Richard Christian Matheson n'est pas un total inconnu en France, puisqu'on a déjà pu lire son excellent roman Cauchemar Cathodique chez Rivages puis dans la défunte collection « Présence du futur » (attention, la traduction n'est pas, dans les deux cas, à la hauteur du texte). On savait depuis les Territoires de l'inquiétude que le fils du grand Richard Matheson (Je suis une légende, L'Homme qui rétrécit, etc.) était un très bon auteur de nouvelles ultra-courtes. Au fil des vingt-huit nouvelles de ce Dystopia-1 (qui, logiquement, devrait être suivi d'un Dystopia-2), Richard Christian Matheson réussit, presque à chaque fois, le tour de force de nous inquiéter ou de nous mettre mal à l'aise. Ce qui est vraiment intéressant chez cet auteur, qui fêtera bientôt ses cinquante ans, c'est son art de la phrase horrible, du point de détail qui transforme une banale histoire (une rencontre amoureuse, deux vieilles qui regardent leurs photos-souvenirs dans un café, un homme qui arpente une route avec un sac en toile, un jogger qui veut courir plus de 80 kilomètres, etc.) en véritable cauchemar.
Voilà un recueil impressionnant, une sorte de fête foraine hybride, cinquante pour cent train fantôme, cinquante pour cent montagnes russes, dont les pics sont probablement « Photos souvenirs » (pages 19-22), « Rouge » (pages 49-52), « Vampire » (pages 97-99), « Troisième souffle » (pages 154-166) et « Incorporation » (pages 171-176). Histoire de pinailler, on regrettera juste les rares incursions de l'auteur dans le domaine de la science-fiction, tel « Le Film » (pages 177-186), excursion post-madmaxienne peu convaincante et bigophonée. Un excellent ouvrage à rajouter au patrimoine d' « Imagine » qui, peu à peu, s'impose comme la collection de référence en matière d'imaginaire tous azimuts.