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Les critiques de Bifrost

Critique parue en avril 2007 dans Bifrost n° 46

Seize ans après la fin du monde (Chromozone), huit ans après les événements narrés dans Les Noctivores, nous voici revenus dans l'univers de Stéphane Beauverger, pour le troisième volume de son cycle Chromozone. Un volume final, du moins annoncé comme tel, où on prend les mêmes (enfin, du moins, ceux qui ont survécu aux volumes précédents) pour suivre les rivières furieuses de leurs existences qui se croisent et se recroisent entre injures, mépris et fusillades : Cendre et Lucie vivent et baisent à Paris, sous la protection du pape Michel ; à Brest, Richard Troadec essaye de faire revivre la grande cité bretonne, d'en faire une nouvelle cité marchande ; plus loin, peut-être de l'autre côté de l'océan, Gémini cherche Laurie Deane, la mère du chromozone ; en Europe, mais aussi autour de Brest et de Paris, les Noctivores de Peter Lerner avancent et menacent. Et puis voilà que le Roméo réapparaît pour se mettre sous la protection du pape Michel, il a un message, il a des secrets… On va tenter de l'assassiner.

Si on en croit le premier rabat de l'ouvrage, « La Cité nymphale est un roman d'initiation post-chaotique, un laboratoire économique expérimental et un manuel de survie en milieu hostile ». Diantre ! Rien que ça. À peu de choses près, on croirait l'argument écrit par le Maurice G. Dantec des Théâtre des Opérations 1 à 3. À mon humble avis, La Cité nymphale est plutôt le troisième volet d'une très intéressante trilogie de fiction spéculative française. Un troisième volet qui boucle la boucle (en quelque sorte), mais qui ne répond pas à toutes les questions que l'on est en droit de se poser sur Peter Lerner, Laurie Dean et les autres. Un opus assez mou des genoux (même s'il y a deux ou trois passages très réussis) qui souffre aussi de certaines envolées stylistiques, pour le moins pénibles.

Avis mitigé, donc, mais il faut dire que Les Noctivores m'avait scotché… Sans doute manque-t-il quelque chose à cette Cité nymphale : un tremblement de terre, l'éruption du Vésuve, un concert gigantesque et spontané. Un final comme dans un opéra. Un coda. À la place, l'auteur offre une larme d'espoir et un discours ; sans aller jusqu'à dire que ce dernier relève de la philo pour les nuls à la Matrix, on est bien loin de Martin Heidegger ou même de Friedrich Nietzsche.

Stéphane Beauverger a du talent, des choses à dire, de vrais personnages, une énorme ambition autant stylistique que narrative ; il lui manque encore un peu d'économie dans l'écriture pour se hisser au niveau de son père en littérature : John Brunner.

Pour finir, on notera que l'ouvrage est vendu avec un CD de Hint (groupe présenté comme industriel, hardcore et jazz), CD qui fait office de bande originale du livre ; l'éditeur ne nous ayant pas fourni la galette, on se contentera, ici, de rendre compte de son existence.

Thomas DAY

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