La compagnie noire, paru voici quelques mois chez le même éditeur, ouvrait le cycle éponyme qui a rendu Glen Cook célèbre dans le milieu de la fantasy anglo-saxonne. Ce deuxième tome poursuit l'histoire (ou plutôt la chronique) de cette armée de mercenaires.
Travailler pour la Dame n'est pas une sinécure. La paie est bonne, mais les membres de la Compagnie se posent de plus en plus de questions… Ont-ils choisi le bon camp, entre leur employeur et la rébellion de la Rose Blanche ? L'Empire de la Dame pourra-t-il continuer longtemps sa politique expansionniste ? Quel sera le prix à payer ?
Bien sûr, de deux maux, il faut choisir le moindre… et la Dame tâche d'empêcher le retour du Dominateur scellé dans sa tombe de pierre. Elle envoie donc la Compagnie à Génépi où, dans le Château Noir dominant la ville, de mystérieux adeptes pratiquent la nécromancie – dans quel but ? C'est la question que se pose Toubib, le médecin de la Compagnie et le rédacteur de ses Annales.
Ce qu'il ignore, du moins au début, c'est qu'un de ses anciens compagnons d'armes, Corbeau, a trouvé refuge à Génépi… Il détient des documents susceptibles de mettre en péril la Dame, et il a juré de protéger Chérie, la jeune muette qui n'est autre que l'incarnation de la Rose Blanche.
De plus, Toubib a un lien mental, avec la Dame. Difficile de garder des secrets par-devers soi, dans ces conditions…
Ce qui frappe, dans cette série, c'est la noirceur des situations et le tragique des personnages. Seul Moorcock, et Leiber sur la fin du « Cycle des Épées », ont poussé aussi loin la subversion du caractère censément « héroïque » de la fantasy. La narration à la première personne, rare dans le genre, renforce cette impression qui peu à peu s'empare du lecteur, celle de patauger dans la boue, le froid, de partager le désespoir des héros de cette saga cruelle et lucide.
Alors, La compagnie noire n'est peut-être pas pour tous les goûts… mais si l'on recherche la face cachée du merveilleux, si l'on est fasciné par l'envers du décor, il n'y a pas de meilleur choix. Intrigues complexes, langage aussi moderne qu'argotique, ambiguïté morale assumée, tout ceci fait de cette série à part une œuvre dérangeante, mais, en fin de compte, étrangement attachante.
Le noir, après tout, ne saurait exister qu'en relation avec le blanc, et l'ombre avec la lumière. Non ?