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Les critiques de Bifrost

Le Grand silence

Le Grand silence

Robert SILVERBERG
J'AI LU
573pp - 8,50 €

Bifrost n° 16

Critique parue en décembre 1999 dans Bifrost n° 16

Ils ont atterri, déclenchant le pire incendie que la Californie ait jamais connu. Ils adoptent des formes diverses, mais tous refusent de communiquer avec l'humanité. Dans les villes de la Terre, ils se promènent, au milieu d'une foule frappée de stupeur – impériaux, invincibles, incompréhensibles. Les extraterrestres sont là, et rien ne sera plus comme avant.

Bientôt les Entités prennent les rênes du pouvoir au niveau mondial, et les pitoyables rébellions sont châtiées, d'abord par des black-out planétaires, puis par une pandémie.

Pourtant, les Carmichael, une famille de soldats, choisissent la résistance, s'entêtent à œuvrer pour le jour lointain où les envahisseurs seront chassés. De génération en génération, elle va poursuivre la lutte, et c'est cette chronique familiale que Le grand silence raconte.

À lire ce résumé, et, à vrai dire, les premières pages de cette roman, on pourrait croire que Silverberg a choisi d'écrire sa version d'Independence Day. Pourtant, dès le début, le ton est donné, car, en dédiant son livre à H.G. Wells, l'auteur entreprend de brouiller les cartes. Roman ? Recueil de nouvelles, histoire du futur sur un demi-siècle. Invasion extraterrestre ? Intrusion, plutôt, pour des motifs difficiles à saisir et qui resteront toujours dans l'ombre. Exaltation de l'esprit de résistance et de combat ? Pas si sûr…

Malin comme un singe, l'écrivain retourne tous les clichés, subvertit le classicisme de son propos et crée avec Khalid, le tueur de sang-froid ultime, un de ses personnages les plus fascinants, cousin des deux héros survivants du Livre des crânes dans sa transcendance mystique et du David Selig de L'Oreille interne dans son humanité perdue et retrouvée.

Pour moi, cet ouvrage n'est rien moins que l'œuvre majeure de Silverberg depuis son retour à l'écriture en 1979. Si son auteur, comme il le promettait dans une excellente interview publiée voici peu par nos confrères de Galaxies, s'en tient désormais à écrire les livres qui lui plaisent, au lieu de ceux qui lui rapportent, et si Le grand silence est bien le prélude à cette nouvelle métamorphose, de belles heures de lecture nous attendent.

Pierre-Paul DURASTANTI

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