[Critique de l'édition anglophone du roman.]
Avec Children of the Mind s'achève la saga d'Ender commencée par le magistral La stratégie Ender. Ender est un personnage au lourd passé, il a commis un xénocide avant de perdre ses dents de lait et s'est racheté par la suite en parcourant l'univers au cours de milliers d'années planétaires pour faire entendre la voix des morts.
Children of the Mind reprend l'action là où Xénocide l'avait laissée. La planète Lusitania abrite une tripotée d'espèces vivantes : les Pequeninos, les Doriphores, quelques humains, une intelligence artificielle nommée Jane et la descolada : un virus tout aussi intelligent que mortel. Les troupes du Congrès sont en route avec le projet de tous les exterminer, menaçant de commettre un quadruple xénocide. Pour Ender, c'est une chance inespérée de laver enfin son nom en sauvant la situation… Seulement Ender est fatigué, et… nous aussi.
Le récit s'essouffle notablement et seules quelques théories bien amenées lui permettent de tenir la route. La découverte de la véritable nature de Jane qui révèle le rôle de l'amour en tant que force agissante de l'univers est de celle-là.
Card est également un créateur de monde efficace : en s'appuyant sur des théories géopolitiques intéressantes il nous propose ici une vision éclairante de la culture japonaise et nul ne peut contester sa maîtrise de la xénologie. Il parvient à donner vie à deux espèces différentes dont le cycle biologique relève d'une admirable inventivité. Le travail de Card souffre toutefois d'un excès d'ambition (de gourmandise diraient certains) : il veut suivre trop de directions et animer trop de personnages. Le rythme de Children of the Mind en souffre et l'on voit les crises éclater et se résoudre avant d'avoir le temps de s'y intéresser.
On ne peut, enfin, s'empêcher de noter au passage que si Children of the Mind est censé achever la saga Ender, Card se ménage toutefois la possibilité d'une suite en amenant ses personnages à découvrir la planète d'origine de la descolada. Et de conclure que le mécanisme des suites multiples est certainement fructueux mais il peut devenir lassant, voire malhonnête.
Vraiment lorsqu'il s'agit d'Orson Scott Card, on ne peut que regretter qu'il ne se consacre pas plutôt à l'un de ces chefs-d'œuvre dont il a le secret. Le temps n'est-il pas venu de définitivement faire mourir Ender et de passer à autre chose ?