Doa. Trois lettres pour un auteur encore peu connu, qui signe ici son premier roman. Et s'offre ainsi l'honneur d'être le premier texte français de la collection « Rendez-vous ailleurs » du Fleuve Noir. Une œuvre brève, efficace, dans la plus pure tradition cyberpunk, avec quelque chose d'un roman d'espionnage un brin désuet. Le tout entre X-Files, James Bond, et un nouvel élément inconnu, le « facteur Doa », peut-être.
Markus Freys est un policier d'origine russe au passé obscur, recruté par Europol pour ses talents parapsychologiques surprenants. Son jeune frère, Joshua, vit exclusivement branché sur le Net : un petit génie du Réseau, qui compense son handicap physique par des aptitudes exceptionnelles à la manipulation du cybermonde. Lorsqu'un détraqué prend en otage les clients d'un grand magasin, on découvre que circule sur le Réseau un personnage qui s'attaque aux passeurs, tentant d'infiltrer leur esprit et générant chez eux une folie meurtrière. L'enquête que débute Freys révèle qu'il a déjà fait des victimes aux quatre coins du monde, et que le rythme de ses attaques s'accélère de façon alarmante. Aidé de Nelly, sa collègue, ainsi que de la psychologue Lise, Freys tente de remonter à la source du mal en recoupant les indices jusqu'à un hôpital militaire américain ; mais il se trouve rapidement bloqué par l'autorité des services secrets de divers pays en cause… Et tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin à l'enquête commencent à mourir… Son frère, lors d'une plongée virtuelle, est attaqué par le cyber-criminel : Freys découvre alors que ce dernier est au courant de secrets les concernant, lui et son frère, qui n'ont jamais été divulgués, pas même aux autorités d'Europol. S'adjoignant l'aide d'un groupe de jeunes passeurs, Joshua remonte la piste de l'entité jusqu'à un laboratoire américain dont les activités sont curieusement suspendues…
Et les « fous d'avril », me direz-vous ? Eh bien, c'est un petit groupe d'amis vivant en Écosse et qui ont en commun d'être arrivés dans cette région au mois d'avril…
L'ensemble se lit d'un trait. Le suspense n'est pas à couper au couteau — le dénouement est convenu —, mais le récit est bien ficelé, sans longueurs inutiles, et les personnages attachants. L'analyse psychologique de Freys, par exemple, est une des grandes forces du texte : on est fasciné par ce qu'il considère comme sa « singularité ». On regrette toutefois que certains personnages et épisodes particulièrement maîtrisés soient comme étouffés par un récit qui demeure très, trop classique. Comme si, pour son premier essai, Doa s'était senti obligé, par convention peut-être, de se couler dans le moule du « techno-thriller » alors que son talent exigerait un cadre probablement plus « déjanté », moins balisé. Mais quoi : voici un bon roman, agréable à lire, et qui promet de l'avenir. On attend du coup le prochain opus, et ce dans un registre qu'on souhaite plus personnel afin de juger pleinement du talent de ce petit nouveau.