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Les critiques de Bifrost

Poids mort

Poids mort

Xavier MAUMÉJEAN
LE ROCHER
9,70 €

Bifrost n° 47

Critique parue en juillet 2007 dans Bifrost n° 47

« — La société actuelle privilégie certains critères de beauté qui sont, disons, beaucoup trop exclusifs. Pourtant, on dit un "beau gros" et jamais "un séduisant maigre".

 Châtel émit un rire soulagé.

 — C'est vrai. Je n'y ai jamais pensé.

 Lanza lui entoura les épaules de son bras.

 — Tenez, par exemple, prenez Marlon Brando et Orson Welles. Vous savez quel est leur véritable point commun ?

 — Le talent ? risqua Paul

 Le professionnel du contact humain s'écarta subitement.

 — Non, trop banal. À Taxinom, on croule sous les demandes de gens talentueux. Je vais vous révéler ce qui lie Orson Welles à Brando : c'étaient des séducteurs. » (pp. 27-28.)

Engagé par Taxinom pour grossir contre rémunération, Paul Châtel s'empiffre et commence évidemment à prendre du poids, beaucoup de poids, jusqu'à mettre en danger sa santé (mentale, avant tout) et à s'aliéner sa famille. Aliénation d'autant plus facilitée qu'on lui a mis dans les pattes une énorme séductrice boudinée qui ferait passer n'importe quel hippopotame de zoo pour une ballerine roumaine. Mais que recherche Taxinom, cette étrange entreprise au service d'ordre fascisant, dont le nom provient du mot taxinomie, c'est-à-dire la « science des lois de la classification » ?

Xavier Mauméjean s'est imposé en sept ans (Les Mémoires de l'homme-éléphant a paru au Masque en l'an 2000) comme l'un des auteurs majeurs de l'imaginaire francophone, et ses deux derniers romans, La Vénus anatomique et Car je suis légion, lui ont valu une reconnaissance critique méritée. Malheureusement, Poids mort n'est pas du même niveau ; au-delà de la farce et de ses bons mots, passée cette scène d'amour d'anthologie qui permet de mieux appréhender l'expression familière « grosse cochonne », le texte finit par tomber à plat dans la piscine de notre plaisir de lecteur alors que, corpulence oblige, on était en droit d'espérer une bombe. Malgré cette déception, sanction classique quand on attend trop d'un auteur qu'on apprécie, ce titre est à ce jour le meilleur que j'aie lu dans l'aberrante collection « Novella SF » (on notera au passage la quatrième de couverture, incroyable, qui est un collage de certaines des phrases les plus percutantes du récit, avec en apéritif et digestif les première et dernière phrases du texte de Mauméjean).

Thomas « merde, faudrait quand même que je perde dix kilos » Day

Thomas DAY

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