Megan LINDHOLM
LIVRE DE POCHE
542pp - 7,10 €
Critique parue en avril 2007 dans Bifrost n° 46
Voici ce qu'on peut lire en page 110 du présent bouquin : « Votre planète est empoisonnée. Les effets de l'empoisonnement sont irréversibles. D'ici deux cents ans, l'espèce humaine ne pourra plus survivre sur votre planète. Il faut l'évacuer dès maintenant, avant que l'empoisonnement n'affecte votre potentiel génétique. Nous sommes là pour aider à l'évacuation. Nous sommes les Arthroplanes. » Une citation qui résume au mieux les enjeux du roman… C'est dit : la race humaine passe sous le giron protecteur des Arthroplanes pour se voir, après quelques manipulations génétiques forcées, réimplantée avec succès (mais sous haute surveillance) sur deux lointaines planètes, Castor et Pollux. Sauf que quelques millénaires plus tard, la méfiance et la curiosité n'ayant toujours pas été éliminées du pool génétique humain, une poignée d'hommes et de femmes se mettent à douter des Arthroplanes qui ne cessent de répéter combien la Terre est pourrie. Ils veulent savoir, ils veulent voir par eux-mêmes. Sous couvert d'une mission banale, ils envoient donc en secret un vaisseau vers la Terre afin d'y effectuer leurs propres relevés. Et pour y trouver quoi, ma bonne dame ?
Il est rare d'observer une telle dichotomie chez un écrivain portant deux noms de plume différents. Autant Robin Hobb est passionnante, autant Megan Lindhom peut se révéler chiante et pénible. La trame de cette petite fable (500 pages tout de même !) philosophico-écolo, alourdie du thème rebattu du retour aux sources, était déjà usée jusqu'à la corde lorsque, en 1992, le livre fut écrit. Chacun sait que la spécialité de Robin Hobb alias Megan Lindhom n'est pas à proprement parler l'originalité. C'est même tout le contraire. Et si Hobb excelle dans la réécriture des mythes standards de la fantasy, Lindhom passe au travers dans le domaine de la science-fiction, et pas qu'un peu.
Nous voici donc avec un récit impersonnel et dépassionné, confit dans un rythme non pas lent mais mou, ce qui est pire. Les personnages sont décevants, sans saveur, à la limite de la caricature. Connie, surtout, l'élément féminin de l'histoire, particulièrement agaçante : indécise, psychorigide, on a plus qu'à son tour l'envie de la balancer contre un mur pour voir le résultat, juste par curiosité. Ainsi se retrouve-t-on coincé à la moitié du livre, et ce sur plusieurs centaines de pages, au cœur d'un huis clos qui fait bailler d'ennui. Un sentiment que rien ne vient sauver, et certainement pas les première et dernière parties, tout aussi mornes et plates, sans rythme autre que contemplatif. La construction même de l'histoire est simpliste. Découpé en deux parties, la première est rigide, monolithique et ennuyeuse. Puis l'auteur introduit un élément déstabilisant, et on bascule dans le chaos. Sauf que… Le chaos chez Lindhom est très lisse, policé, et surtout très, très, prévisible. À oublier, et vite.