Ada REMY, Yves REMY, Jean-Marc AGRATI, Lisa TUTTLE, Robert HOLDSTOCK, Garry KILWORTH, Jacques MUCCHIELLI, Benjamin DROMARD, Léo HENRY, Laurent RIVELAYGUE
DYSTOPIA
288pp - 15,00 €
Critique parue en avril 2013 dans Bifrost n° 70
Ce recueil, c’est aussi bien une anthologie qu’un manifeste. Examinons les choses dans l’ordre.
Après une introduction qui présente la maison d’édition, son histoire et ses projets, le sommaire aligne les récits. « Le Vieux M. Boudreaux », de Lisa Tuttle, est une histoire de hantise, et de filiation, et de retour à l’enfance ; c’est aussi un petit chef-d’œuvre de subtilité et de classe. « Coups de feu dans la forêt », d’Yves et Ada Rémy, une novella, renoue quelque peu avec l’ambiance des Soldats de la mer, en mettant en scène un jeune homme, dans une petite ville allemande du XIXe siècle, que la vision fortuite d’une femme dont il va aussitôt tomber amoureux précipite dans une succession de rêves signifiants ; comme toujours avec ces deux magiciens du verbe, l’écriture est à se damner. L’autre novella, « L’Arbre à épines », de Robert Holdstock et Garry Kilworth, raconte une obsession aussi vieille que le monde, la quête de l’immortalité, qui promène son archéologue de protagoniste aux quatre coins de l’horizon et permet aux deux complices de livrer des parodies enjouées de divers auteurs du patrimoine, de Homère à Shakespeare en passant par Chaucer ; le tout est aussi goûteux qu’un bon beef broth. « Journal anticipé d’un écrivain mythomane », du regretté Jacques Mucchielli, est une métafiction sur Yirminadingrad qui s’inscrit dans ledit cycle ; un texte douloureux et sensible que Léo Henry présente avec la pudeur des vrais amis. Suit un long entretien avec ces deux compères (et l’illustrateur Stéphane Berger), toujours sur le cycle en question, et un extrait de Sur le fleuve, roman picaresque des mêmes.
Cette Anthologie se veut bien évidemment une vitrine du travail que réalise Dystopia et propose d’ailleurs un certain nombre de pistes pour qui souhaiterait aller plus loin que faire son simple boulot de lecteur ou de lectrice. Sur le plan purement formel, force est de reconnaître que la qualité est au rendez-vous, et tout le mal qu’on souhaite à ces fêlés de la chose littéraire, c’est que de plus en plus de monde puisse s’en rendre compte. Ce beau volume devrait y contribuer.