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Les critiques de Bifrost

Entre deux romans du « Cycle des Xeelees », Stephen Baxter a écrit sa première uchronie, Anti-Ice — mais pas la dernière (les deux séries inédites en français « Time’s Tapestry » et « Northland »). L’Histoire, qu’elle soit passée ou à venir, est un domaine qui intéresse particulièrement notre auteur.

Anti-Ice débute en 1870 à Manchester, actuelle capitale du Royaume-Uni. L’Exposition universelle bat son plein ; sur le continent, la tension monte entre la France et la Prusse de Bismarck à cause de la fameuse dépêche d’Ems. La position britannique est déterminante depuis la découverte, une dizaine d’années plus tôt, d’un gisement d’antiglace en Antarctique. Avec cette matière, le Royaume-Uni est devenu la plus grande puissance mondiale. Qu’est-ce que l’antiglace ? Un composé qui tient de l’uranium et de l’antimatière, hautement instable et qui, réchauffée, dégage une énergie monstrueuse. Domestiquée, on emploie l’antiglace dans des applications civiles ou militaires.

Les beaux yeux d’une belle Française vont emmener le jeune Ned Vicars, diplomate vaguement benêt, dans les Flandres, sur les chantiers de construction du Prince-Albert, navire terrestre mu à l’antiglace. Mais un attentat contre ce Léviathan des terres va propulser Ned, littéralement, dans l’espace. Le voilà à bord d’une chaloupe de sauvetage en forme de fusée, en compagnie d’un ami journaliste, de Sir Josiah Traveller, découvreur de l’antiglace et inventeur génial par ailleurs (la fusée est de sa conception)… et d’un terroriste, naturellement de nationalité française. Très vite, il s’avère que l’engin spatial ne se dirige nulle part ailleurs que vers la Lune, où la petite compagnie va effectuer une excursion. Et Ned d’être le premier homme à poser le pied sur notre satellite, où l’attendent quelques surprises. Il sera temps de rentrer sur Terre, où l’Europe est à la veille de la guerre…

Troisième roman de l’auteur, à une époque où il n’écrivait pas des pavés de cinq cents pages, Anti-Ice est un divertissement mené à un train d’enfer, qui tient tout à la fois de Jules Vernes (De la Terre à la Lune/Autour de la Lune) et des aventures de Tintin (Objectif Lune/On a marché sur la Lune) sans omettre, dans une moindre mesure, Les Premiers hommes dans la Lune de H. G. Wells. Quoique Anti-Ice soit une aventure d’inspiration nettement plus vernienne que wellsienne, mêlant non sans bonheur steampunk avec un zeste de hard science. On y retrouve également les thématiques de Stephen Baxter : le fort esprit d’initiative de ses protagonistes, la persistance de la vie, où qu’elle soit, ainsi que quelques interrogations sur l’Histoire et ceux qui la font. Un brin cocardier (Rule, Britannia !) ? Peut-être, mais on le pardonnera à Baxter pour le plaisir de lecture qu’il nous procure.

Pour ceux qui seraient tentés par cette parenthèse steampunk tout à fait bienvenue dans l’œuvre de Stephen Baxter, il se murmure qu’une traduction d’Anti-Ice serait prévue prochainement aux éditions du Bélial’…

Erwann PERCHOC

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