Orson Scott CARD, Jay A. PARRY
L'ATALANTE
304pp - 15,50 €
Critique parue en septembre 2000 dans Bifrost n° 19
Second recueil des nouvelles d'Orson Scott Card, auto-commentées, qui porte le titre générique de Portulans de l'Imaginaire, Avatars reprend les tous premiers textes de science-fiction de l'auteur. On s'aperçoit que l'humain est dès le départ au centre de ses intrigues ; les technologies futures ou les avenirs que dessinent nos sociétés préoccupent peu Card : il les invente pour illustrer ses propos. Ainsi, à la question de savoir jusqu'à quel point peut-on soumettre un individu, il crée une société ressuscitant ses condamnés jusqu'à l'obtention d'un repentir sincère (« Mille morts »). Des regrets au souvenir de rencontres qui ne se sont pas faites, une réflexion sur les petits tracas de la vie quotidienne (suis-je à ce point unique que rien n'est jamais à mon goût ?) débouchent sur un troublant voyage temporel ou sur le spectre de la classification systématique de l'individu par une société se voulant efficiente. Réfractaire au cyberpunk, Card, en le parodiant, en tire des effets inédits, qui ont bien peu de rapports avec ce courant (« Trottecaniche »).
Le clou du recueil reste cependant la novella située dans l'univers de Fondation, « L'Originiste », déjà publiée dans Les Fils de Fondation chez Pocket. Card pense s'être rapproché le plus possible du style d'Asimov tout en respectant son univers ; pourtant il a tant et si bien fait qu'il a dépassé le maître… et proposé du pur Orson Scott Card dans un récit magique qui traite à la fois de l'origine et du sens du langage, de ce qui définit l'humain et rapproche les hommes entre eux, de la façon d'établir des liens et des relations entre des concepts apparemment éloignés, questions philosophiques incluses et non annexées à l'intrigue, au point d'en être centrales tout en étant magnifiquement déclinées et illustrées à travers la relation amoureuse d'un couple. Du grand art !