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Les critiques de Bifrost

Black velvet

Alain DORÉMIEUX
DENOËL
7,60 €

Critique parue en mai 1997 dans Bifrost n° 5

« Anna chuchota : “Tu aurais dû t'enfuir, pauvre rat.” Elle rejeta le buste en arrière, le bras levé. La lame jaillit avec un cliquètement sec. Bellmer se contorsionnait, essayant de hurler… […] Avec un sourire de regret elle abattit le couteau plusieurs fois de suite, perforant la région du cœur.

La parution simultanée de Black Velvet d'Alain « Territoires de l'Inquiétude » Dorémieux et du Neuvième Cercle de Fabrice Colin, m'a donné l'idée d'une nouvelle échelle personnelle de cotation des romans. C'est ainsi qu'en lieu et place sempiternelles étoiles, j'utiliserai désormais le « BEURK ». Dans cette nouvelle échelle j'attribuerai donc deux BEURKs à Black Velvet et trois BEURKs à Neuvième Cercle.

Que le lecteur (et les auteurs, s'ils me lisent) se rassurent, c'est sûrement moi qui n'arrive pas à me faire à un certain genre de littérature… euh… « fantastique », plutôt courant dans les bacs de nos libraire. Le gore, le sexe, la perversion sont les fondations des textes d'épouvante les plus classiques et prestigieux (… et un joyeux anniversaire à Dracula !). Mais à propos, les fondations ne sont-elles pas les éléments d'une maison qu'on aperçoit lorsqu'on la construit ou… quand elle est par terre. À moins bien sûr d'avoir oublié un mur…Ou d'être l'un de ces teenagers impayables qui décide de descendre à la cave ou de creuser dans la cheminée histoire de savoir ce qui peut bien faire ce petit bruit de grattements une fois la nuit tombée…

Or donc, que trouve-t-on dans cette réédition révisée d'un roman de 1991 signée par l'anthologiste francophone de l'étrange Alain Dorémieux ? À la croisée de Répulsion (de Polanski) et de Possession (de Zulawski) nous dit la jaquette, Black Velvet raconte folie plus ou moins progressive d'une jeune femme qui, parce qu'elle a été violée par son père, se met à découper ses amis. Oups, vous savez tout. Bon, c'est vrai, il y a un spectre dans le miroir et des tas de détails un petit peu cradingues, mais ça ne va pas vraiment plus loin.

Alors, oui, peut-être Dorémieux est-il maître dans la description minutieuse et pleine de jolies phrases sur la dégradation psychique d'une adolescente névrosé — ou, si vous préférez, de la mise en roman de cas de psychopathies cliniques. Et quoi ? Où est l'intrigue ? La fille est folle, d'accord. Où est la réflexion ? Tout le monde coucher avec elle et personne ne la connaît assez pour savoir qu'elle va vous mettre dans son congélateur? Où est la peur ? Je ne vois que le dégoût. Où est le Fantastique, cette merveilleuse et troublante fascination qu’il exerce sur le commun des mortelles? Je sais qu'on n'est pas dans La Belle et la Bête et certainement pas dans un film de Walt Disney, mais entre Le Bébé de Rosemary, Polstergeist, Shining et même Freddy, il est clair qu'on peut faire mieux faire que les vagues hallucinations meurtrières d’une victime de l'inceste. Je veux grimper aux murs ! Je veux mon train fantôme!

Il n’est certes pas ici.

David SICÉ

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