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Les critiques de Bifrost

Blanche neige, rouge sang

Terri WINDLING, Ellen DATLOW, Tanith LEE, Gahan WILSON, Charles DE LINT, Nancy KRESS, Wendy WHEELER, Kathe KOJA, Gregory FROST, Harvey JACOBS, Steve Rasnic TEM, Melanie TEM, Neil GAIMAN, Leonard RYSDYK, Esther M. FRIESNER, Jack M. DANN, Lisa GOLDSTEIN
FLEUVE NOIR
372pp - 18,00 €

Critique parue en avril 2003 dans Bifrost n° 30

Je l'imagine bien, l'Abbé Ruaud, ouvrant son église lyonnaise du jeudi midi et s'apprêtant à faire son prêche tel Orson Welles au début du Moby Dick de John Huston. Je vois parfaitement les visages de l'assemblée, caressés par la lumière colorée que laissent passer les vitraux représentant la féerique trinité : Elric, Merlin et Gandalf. Dans le public, ça frétille déjà des neurones : le maître va parler, une fois ses lunettes recalées sur le bout de son nez. « Mes très chers frères, mes très chères sœurs, lecteurs, lectrices, cette nuit la Reine des Fées est venue à moi. Elle était là, arrivée tout droit de Faërie, assise au bord de mon lit, un hanap à la main. Elle m'a regardé droit dans les yeux et m'a murmuré un secret. Ce secret, aujourd'hui je vous le livre. Des trois anthologies de fantasy publiées ces dernières années par le Fleuve Noir, la meilleure est de loin… » Silence total, même les fées ont arrêté de battre des ailes. Les visages de crispent. Henri Lœvenbruck et Alain Névant se prennent par la main ; coincé entre les deux, Stéphane Marsan s'est caché au fin fond de son col roulé noir. L'Abbé Ruaud se racle la gorge : « L'anthologie d'Ellen Datlow et Terry Windling, Blanche neige, rouge sang. » L'assistance est consternée, les fées se sont remises à battre des ailes et fusent en tous sens, ivres de joie.

Force est de constater qu'elle a raison, cette terrible Reine des Fées, car à l'exception de quelques nouvelles faibles (celles de Gahan Wilson, Kathe Koja, Leonard Ryskyd), le reste tient méchamment la route. Et dans le flot de ces contes anciens (Blanche Neige, Hansel et Gretel, le Petit Chaperon Rouge) remis au goût du jour, modernisés, quelques textes emportent le morceau, telle la version du Petit Poucet que nous propose Steve Rasnic Tem, ou cette « Fille de Gothel » que nous offre le méconnu Gregory Frost. Le texte le plus percutant de cette anthologie est peut être celui de Wendy Wheeler, « Carmina », un mélange sulfureux du Petit chaperon rouge et de Lolita.

Unique bémol, mais de taille : impossible de ne pas signaler la globale médiocrité des traductions, qui oscillent entre l'épouvantable (celles des deux introductions — non signées) et le correct (Florence Mantran) en passant par le médiocre (Duveau et Fazi). Et puis, prendre Siudmak pour illustrer pareil livre…

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