Né en 1973, Christophe Langlois a travaillé à la Bibliothèque Nationale de France, dont il fut directeur du service Philosophie et religion. Amateur de Borges, Roald Dahl et de poésie allemande, blogueur, il passe à l’écriture avec Boire la tasse, son premier recueil de nouvelles, publiées par les toujours très intéressantes éditions de L’Arbre Vengeur.
Ce qui frappe au premier abord à la lecture de ces quinze textes, c’est l’imagination de l’auteur : on rencontre ainsi des hommes et femmes cédant à la mode de rendre translucides certaines parties de leur corps ; Hitler qui passe sur une route de Seine-et-Marne tous les ans à la même date, en Renault Laguna ; la poussière, qui nous parle de sa conception de l’existence ; des hommes qui font vœu de silence et sont condamnés pour cela ; un Christ androïde un peu dissipé ; ou encore les visiteurs d’un musée qui ne savent pas dans quel piège ils sont en train de tomber… Langlois s’en donne à cœur joie pour nous offrir une pyrotechnie de situations abracadabrantesques et de personnages invraisemblables, et compte sur le lecteur pour participer en suspendant son incrédulité. Ce qui fonctionne d’autant mieux quand l’auteur ancre le début de ses nouvelles dans la réalité la plus proche de nous : l’effet de surprise en est démultiplié. L’aspect ludique est de fait primordial ici ; rien de surprenant donc à ce que certains de ces textes se terminent par une chute ou un retournement.
Vu la diversité des thématiques, ce recueil se devait toutefois de trouver une unité pour trouver son sens et être davantage qu’une juxtaposition de nouvelles ; cette unité est fournie par deux éléments : l’humour et le style. L’humour, tout d’abord, parce qu’il imprègne l’ensemble du recueil, du plus noir (« Coupe sombre ») au plus accessible (« Le Bon Pasteur »), et vient renforcer l’aspect ludique évoqué plus haut ; Christophe Langlois se situe quelque part entre Buzzati, Sheckley et Brown. Le style, quant à lui, est d’une maîtrise peu commune pour un premier recueil ; il sait se faire tour à tour envoûtant et sec, poétique et pragmatique, de façon à coller à la thématique de la nouvelle. Et toujours sans fioriture ni esbroufe excessives : l’auteur va à l’essentiel, et on lui sait gré de cette retenue.
Au final, Boire la tasse s’avère un excellent recueil, débordant d’idées, de textes ciselés, et en tout cas une authentique révélation d’un nouvel auteur à suivre de très près : Christophe Langlois.