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Les critiques de Bifrost

Ce qui reste après les tempêtes

Ce qui reste après les tempêtes

Sylvie POULAIN
BRAGELONNE

Bifrost n° 113

Critique parue en janvier 2024 dans Bifrost n° 113

Pour les raisons les plus bassement commerciales, la quatrième de couverture évoque les films Avatar (on supposera ici qu’il s’agit du deuxième volet) et Abyss. 20 000 lieues sous les mers aurait bien mieux convenu, voire Voyage au Fond des Mers la célèbre série TV des années 60 crée par Irvin Allen, mais c’est davantage encore à SeaQuest et surtout au Jeu et aux romans « Polaris » de Philippe Tessier que s’apparente Confluence, en bien mieux – sans qu’il y ait toutefois lieu de s’esbaudir. Chaque tome est divisé en quatre parties qui auraient constitué chacune un très honnête Fleuve Noir des années 80. On tient là de la bonne littérature populaire dans le genre aventures sous-marines et le bon sens du terme.

Tout comme dans « Polaris », l’humanité a été contrainte de se réfugier sous les flots. Le roman de Sylvie Poulain se montre moins belliqueux de « Polaris ». Avant d’écrire, elle a été militaire – et ce sont les militaires qui sont rarement les plus va-t-en guerre, car ils savent de quoi il est question. On notera que l’Atlantis de Confluence dont le rôle s’apparente à celui de l’OTAN, ici baptisé Pax, est située au même emplacement géographique que l’Hégémonie dont le nom trahit les ambitions dans l’univers développé par Philippe Tessier ; soit au large de Washington. Poulain n’est certes pas Henry James, mais de celui-ci à Tessier s’étend la totalité de la littérature ou peu s’en faut et les personnages de Confluence sont animé d’une certaine psychologie en évolution, souvent à la recherche d’une forme de rédemption et doté d’un passé trouble qui revient hanter le présent.

Tout commence par l’assaut lancé par Atlantis contre Providence, une cité ayant survécu à une catastrophe dans les abysses grâce à une symbiose avec un micro-organisme marin à l’origine d’une sorte de télépathie, la confluence. Les Atlantes voudraient s’emparer de ces techniques et considèrent Providence comme une menace à mettre au pas mais l’affaire tourne mal et les Proventins préfèrent saborder leur cité que de livrer leurs secrets. Ne survivent que Jihane et Wolf. La jeune fille est la dépositaire de toutes les mémoires des Proventins qui constitue un fardeau un peu lourd pour elle. Wolf est un sous-off atlante parti à la poursuite de Jihane guidé par Atlas, l’IA qui règne sur Atlantis, via ses implants qui régule et manipule sa chimie cérébrale. Ils sont recueillis par le Grondin, un submersible de la Hanse venu observer les événements. La Hanse est une entité chargée des échanges et du commerce entre les divers membres de l’intercommunauté. Tandis que Jihane tente de reconstituer une confluence et que Wolf change de camp en rompant ses liens ; on découvre l’équipage du Grondin où tous ont un passé chargé que l’on découvre au fil du roman. Le Grondin ne tarde pas à se voir traqué par tout ce qui navigue.

L’univers développé par Sylvie Poulain semble gynécocratique – à une exception et demi près : Veers (le bâtonnier de la Hanse) et Atlas (une IA traitée comme masculine) qui sont au nombre des méchants –, toutes les autorités étant féminines. À commencer par Carmen de Klerk, commandant du Grondi ; Suzanna Li, amiral d’Atlantis ; Imane Battouri, Archonte d’Atlantis sensée supervisée Atlas, ces deux ont la relation saphique de rigueur ; Némo, maffieuse et psychopathe sanguinaire régnant sur les Açores a un passé qui n’est pas sans évoquer celui du personnage de Jules Verne et rêve de dominer le monde qu’elle estime ne pas l’avoir traitée comme elle l’estimait juste et compte sur le symbiote proventin pour y parvenir ; Claudia Quandt commande un sous-marin de la Hanse et Lindsay, la Station Hope. Tous les autres hommes n’ont que des fonctions subalternes même s’ils sont des personnages importants du récit.

Si les deux volumes de « Confluence » sont assez volumineux, leur mise en page est relativement aérée. L’ensemble lecture sommes toutes agréable mais qui ne révolutionnera pas la littérature. En ces temps de médiocratie galopante et frénétique, c’est plutôt bon pour un livre récent qui n’est pas une réédition. Même si le roman compte des aspects scénaristiques hollywoodiens qui peuvent prêter à sourire ; l’histoire est cohérente et se tient.

Jean-Pierre LION

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