Suite et fin de l’histoire de la Spire (cf. critique des tomes 1 et 2), cette compagnie de transport interstellaire créée par une poignée d’aventuriers en réaction aux méthodes des grandes compagnies déjà en place et qui, au fil des ans, a gravi les échelons de la respectabilité et du pouvoir, quitte à renier ses idéaux d’origine et à devenir ce qu’elle a toujours combattu. Comme les précédents tomes, celui-ci ressemble à un fix-up sans en être tout à fait un. De ce point de vue, la première partie du récit est aussi la moins convaincante. L’histoire de ces colons envoyés sur une planète où leurs prédécesseurs ont tout abandonné sans qu’on sache pourquoi ne manque pas d’intérêt, et les menaces qu’ils affrontent sont spectaculaires à souhait, mais on quitte ce monde sans connaître le fin mot de cette histoire, impression frustrante s’il en est. La suite est plus réussie. Genefort s’y attaque pourtant à ce qui constitue la tarte à la crème du space opera, les pirates de l’espace, mais la société singulière et complexe que l’on y découvre va à rebours de tous les stéréotypes du genre. Les derniers chapitres du roman sont consacrés à l’évacuation en catastrophe d’une colonie où les conditions de vie se sont brutalement détériorées et où chaque heure compte.
Chacune de ces situations permet aussi à l’auteur de mettre en lumière les relations de plus en plus tendues entre les principaux dirigeants de la Spire et l’évolution de la politique de la compagnie. Des querelles internes qui ne cessent de s’envenimer au fil des pages, et dont les conséquences s’avèreront au final dévastatrices.
Avec ce dernier tome, Laurent Genefort poursuit son hommage aux grands auteurs qui ont pavé la voie du genre, Heinlein et Anderson en tête. Mais on aurait tort de ne voir en « Spire » qu’un simple pastiche, aussi réussi soit-il. Sur le fond comme sur la forme, il s’agit d’une œuvre résolument moderne, qui s’intègre parfaitement dans l’univers que développe l’auteur depuis un bon quart de siècle maintenant, l’un des plus riches et des plus cohérents que la science-fiction française nous a donné à ce jour. On aurait volontiers signé pour trois tomes de plus.