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Les critiques de Bifrost

Chung Kuo

David WINGROVE
FLORENT MASSOT PRESENTE
16,90 €

Critique parue en avril 2003 dans Bifrost n° 30

Au XXIIIe siècle, la Chine domine le monde. Celui-ci a été divisé en 7 provinces continentales. Et autant de cités. La population a continué de croître de manière exponentielle, de sorte que la Terre entière est désormais recouverte d'éléments urbains hexagonaux sur trois kilomètres d'épaisseur. Une alternative architecturale aux monades urbaines chères à Silverberg.

Chung Kuo, l'Empire du Milieu, a vocation à une intangible pérennité mais, dans la cité Europe, des troubles naissent. Des hommes d'affaires blancs fomentent des complots pour imposer le changement et, au besoin, renverser le T'ang, l'empereur.

En quatrième de couverture, Chung Kuo nous est présenté comme une œuvre équivalente à Dune, de Frank Herbert… Une fois de plus. Et une fois de plus, il n'en est rien. Certes, Chung Kuo est un roman plus long que Dune, et même plus long que Dune et Le Messie de Dune réunis. Mais Chung Kuo est un roman TROP long. Il ne suffit pas qu'un roman mette en scène des intrigues de palais pour se prétendre Dune. Au demeurant, Gloriana ou la reine inassouvie de Michael Moorcock est un fort roman animé de nombreux personnages se livrant à des intrigues de palais que nul n'a jugé bon de placer en regard de Dune parce que Moorcock se vend aussi bien qu'Herbert. Des personnages nombreux n'arrangent rien dès lors qu'ils sont TROP nombreux. Il ne saurait suffire de les multiplier à l'envi pour égaler Dune. Quant à la multiplication des intrigues et sous-intrigues, elle me fait penser à L'Aube de la nuit, le gigantesque western galactique de Peter F. Hamilton, comme si l'on nous contait par le menu l'histoire du Far West à travers chaque duel de cow-boys.

En main, le livre est pesant, mais pas seulement. À la multiplication des bonshommes, lieux et intrigues, la traduction semble encore avoir ajouté sa petite touche.

Et pourtant ! Cet univers avait un réel potentiel, tout pour être fascinant. Dominé par la Chine, ou plutôt la culture chinoise, avec son conservatisme et son traditionalisme comme base d'une société avide de stabilité, centrée sur la Terre, face à un culture occidentale désormais en infériorité politique mais égale à elle-même, éprise de liberté et des progrès, le monde proposé par David Wingrove avait une réelle originalité, explorant un avenir probable dans son schéma à défaut de l'être dans sa mise en scène.

Le traitement n'a pas été à la hauteur du potentiel. Derrière toutes ses intrigues, la problématique est par trop succincte, pour ne pas dire absente. Chung Kuo n'alimente pas notre réflexion sur le monde et c'est bien dommage. Reste la possibilité de se divertir, au risque d'une certaine lassitude.

Jean-Pierre LION

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