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Les critiques de Bifrost

Daemone

Thomas DAY
LE BÉLIAL'
224pp - 15,00 €

Critique parue en octobre 2020 dans Bifrost n° 100

Si l’on fait le compte, on constate que Thomas Day n’a pas produit tant de science-fiction que ça, et moins encore si on ne prend en compte que la forme longue. Tout juste L’École des assassins, co-écrit avec Ugo Bellagamba, et, si l’on souhaite pousser le sadomasochisme littéraire jusqu’à admettre son existence, Resident Evil. Et aussi (et surtout), ce Daemone que l’auteur visitera à deux reprises.

Daemone Eraser est un fantôme, ou du moins un homme qui a cessé de vivre le jour où il a perdu sa femme et son enfant à naître. Depuis, il ne cesse de remettre en jeu son titre de champion dans l’Arène, sous le regard de milliards de spectateurs, dans la vaine attente de l’adversaire qui saura enfin mettre fin au vide que constitue sa vie. Jusqu’au moment où un extraterrestre, guerrier du temps de son état, lui propose un pacte faustien : la vie de sa femme contre la mort de cinq criminels parmi les pires qui soient. Comment refuser une telle offre ?

Paru initialement en 2001, Daemone est en premier lieu un bel hommage de Thomas Day aux grands auteurs de science-fiction qui ont marqué son adolescence, de Vance à Silverberg en passant par Zelazny. On pourra s’amuser aussi à noter les emprunts cinématographiques, Blade Runner, Videodrome et autres… Dans la manière dont il s’approprie les thématiques et les façons de faire de ses aînés, on pense aussi souvent au pan le plus noir de l’œuvre de Mike Resnick.

Sur la forme, Daemone enchaîne sans temps mort les morceaux de bravoure : chasse au dragon ou guérilla meurtrière en milieu urbain, Thomas Day fait montre d’une redoutable efficacité dans ces passages d’une lisibilité exemplaire.

Sur le fond, le roman relève de la tragédie la plus classique, une histoire d’amour perdu que le héros s’avère incapable de surpasser. Et malgré tout le sexe et la violence dont il parsème son récit, l’écrivain reste fidèle aux règles du genre.

Dix ans après sa parution initiale, Thomas Day reviendra à Daemone pour en proposer une version partiellement réécrite et étoffée. Les différents protagonistes y gagnent en épaisseur, motivations et relations y sont davantage développées, et le récit s’inscrit de manière plus explicite dans le cycle auquel il appartient (cycle pour l’essentiel toujours à l’état de projet et dont on n’a sans doute pas fini d’attendre la suite). L’essentiel demeure : sous une forme ou une autre, Daemone est un roman qu’on ne lâche pas de la première à la dernière page.

Philippe BOULIER

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