George R.R. MARTIN, Gardner DOZOIS, COLLECTIF
J'AI LU
480pp - 17,90 €
Critique parue en janvier 2017 dans Bifrost n° 85
Deux mois.
Il aura fallu deux mois à votre serviteur pour venir à bout de la bête (non sans s’entêter à finir des nouvelles franchement pénibles comme celle de Lev Grossman, qui est tout sauf un magicien des mots – j’ai failli écrire qu’il avait à peu près autant de talent que de cheveux, mais je me suis souvenu à temps, ouf, que le rédac’chef de Bifrost devient sensible du bronzage dès qu’on tente la blague capillaire).
Avec un titre pareil, Dangerous Women, Martin et Dozois aux manettes, on s’attend forcément à de la reine uber-cruelle, à de la sorcière sadique, à de la salope de compétition inter-planétaire, à de la ninja sous tequila-kétamine, à de la psychopathe qui ferait passer une héroïne de Morgane Caussarieu pour Candy ou Heidi ou Sissi (enfin, une endive quelconque dont le prénom finit en « i »), à de la fliquette hardcore qui cogne avant de parler, avant de baiser, mais pas avant de siffler ses trois cafés noirs, sans sucre. J’attendais des femmes fatales, des camionneuses taillées pour les bermudas de Schwarzy et le t-shirt mouillé de Tura Satana.
Bon, globalement, on a plutôt droit à de la Candy qui hausse le ton, de la Sissi qui montre les dents, mais pas trop, et à de la Heidi victime des hommes (pensez à remplacer le chalet suisse par un motel californien). Toutes à peu près aussi dangereuses qu’un rhume sénégalais. On se demande où sont passées les Lisbeth Salander du XXIe siècle. Au stand de tir, sans doute…
Les fans du « Trône de fer » trouveront au sommaire une chouette novella du cycle (que J’ai Lu va sans doute trouver le moyen d’exploiter six fois avant la réélection de Donald Trump) : un court roman de plus de cent pages avec des personnages de reine et de princesse en conflit qui, malheureusement, n’arrivent ni l’une ni l’autre à la cheville de Cersei Lannister. Les fans de Joe Lansdale se régaleront avec son histoire délicieusement cradingue de sorcière du catch. Pour le reste, mouais, c’est pas bien terrible.
Pour couronner le tout, le découpage français est étrange : tous les auteurs masculins ont été regroupés dans le tome 1 (choix sans doute dû au fait que l’auteur du « Trône de fer » ne s’appelle pas Georgette Regina Ramona Martine). C’est un peu goujat d’ouvrir grand la porte et de passer avant les dames. Espérons que dans le second tome de cette anthologie, les auteures/autrices sauront relever le gant et nous proposer des portraits de femmes vraiment dangereuses. Je ne sais pas pourquoi, j’ai un petit doute.