Michel CHION
CAHIERS DU CINÉMA
287pp - 23,00 €
Critique parue en septembre 2002 dans Bifrost n° 27
David Lynch est-il un enfant insupportable dont les excès deviennent films, alors que d'autre trouveraient là matière à mauvais coups ? C'est ce que semble penser Michel Chion, qui nous propose un livre remarquable sur ce grand cinéaste américain qui n'a jamais cessé d'explorer les franges de l'imaginaire, n'y plongeant réellement que pour un Dune injustement haï. Cet ouvrage (publié pour la première fois en 1992) a été mis à jour puisqu'il prend en compte le succès de Mulholland Drive (plus critique que commercial) et les dernières publicités réalisées par Lynch. Il nous propose un voyage quasi-chronologique dans l'œuvre du réalisateur, de ces premières rencontres avec Terence Malick (au début des années soixante-dix) jusqu'aux scènes incompréhensibles (quel plaisir !) de Mulholland Drive.
Au fil de ces pages, véritable eau-forte du cinéma indépendant américain, on lira aussi quelques interventions totalement hallucinées, voire grotesques ; comme celle de Dino de Laurentiis, célèbre producteur italien capable du meilleur comme du pire (surtout le pire) : « Quand j'ai fait La Strada avec Fellini, les critiques italiens ont dit : « bof, Fellini ». Mais la critique française a dit que c'était un des plus grands films jamais faits. Pour David Lynch, c'était pareil. D'abord il avait fait un petit film à la con (Eraserhead), peu après il a fait un vrai film, Elephant Man. Je l'ai choisi pour Dune. J'ai encore inventé un nouveau metteur en scène ». (page 35)
Tout comme David Lynch, Michel Chion a compris que l'essentiel se trouve parfois de l'autre côté des grandes tentures rouges… Celles du business, celles du réel. Voilà donc un livre incontournable pour les fans du réalisateur le plus barré ayant jamais existé. Dans la même collection, on se jettera aussi sur le David Cronenberg, signé Serge Grünberg.