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Les critiques de Bifrost

Critique parue en juillet 2019 dans Bifrost n° 95

Déjà bien connue des lecteurs des éditions L’Atalante, l’écrivaine américaine Martha Wells a récemment été couronnée par les prix Hugo, Nebula et Locus de la meilleure novella pour Défaillances Systèmes. Ce court récit de 122 pages est depuis devenu le point de départ d’une série nommée « Journal d’un AssaSynth » que L’Atalante, certainement bien encouragé par le succès de la fameuse collection « Une heure-lumière » des éditions du Bélial’, a décidé de publier entièrement d’ici octobre prochain — soit un total de quatre novella, ce qui fait tout de même, pour peu qu’elles soient toutes proposées au même prix, un ensemble de la taille d’un roman classique pour 43,60 euros…

Dans ce premier opus, notre narrateur, un androïde de sécurité (ou SecUnit), nous explique comment son expédition au cœur d’une planète lointaine l’a amené à pirater son propre module superviseur chargé, en théorie, de le plier à la volonté de ses maîtres et d’en faire un serviteur docile. Même si les humains qui l’accompagnent ignorent cette émancipation dans un premier temps, il se trahit rapidement lorsqu’il doit voler au secours de deux des scientifiques aux prises avec une mystérieuse et monstrueuse créature surgit du sol. Une surprise d’autant plus désagréable que la planète était classée comme sans danger par la Compagnie. Interrompant ses activités récréatives, AssaSynth, notre cyborg narrateur, comprend vite que quelque chose cloche et que ses collaborateurs humains risquent la mort à tout moment car… quelqu’un les a trahis !

Texte court, donc, et scindé en huit chapitres qui ne laissent aucun temps mort aux lecteurs. D’autant plus qu’AssaSynth s’avère vite un narrateur drôle et cynique goûtant peu la compagnie des humains, qui l’embarrassent, ni non plus celle de ses propres congénères androïdes, qui n’ont rien à faire de lui. Plus intéressé par sa série télévisée Apogée et déclin de la Lune sanctuaire — en fait un soap de bas étage —, notre androïde mi-biologique mi-machine finit tout de même par se prendre d’amitié pour le Dr Mensah. Son interaction avec les autres humains, ainsi que sa volonté increvable de vouloir décider par lui-même, rendent AssaSynth absolument délicieux à suivre. Martha Wells, non content d’avoir trouvé là un personnage principal prometteur et attachant, construit en arrière-plan un univers ultra-connecté où les aspects humains les plus vils n’ont pas disparu, bien au contraire. Efficace dans ses scènes d’actions comme dans son humour et son message politique, Défaillances systèmes se dévore à toute vitesse. Même si l’on se demande bien ce que nous réserve la suite de la série (et comment elle pourra éviter la répétition), ce premier opus laisse au final une excellente impression qui ravira tous les fans de SF désireux de ne pas sacrifier la qualité sur l’autel du divertissement pur et dur.

Nicolas WINTER

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