Sabrina CALVO
J'AI LU
7,00 €
Critique parue en janvier 1998 dans Bifrost n° 7
Délius est un must. Si vous vous demandiez où voulait en venir Mnémos à travers toute cette production de Fantasy précieuse et alambiquée, lisez ce roman. David Calvo est une fois de plus un nouvel auteur sur le marché, mais contrairement à la majorité, il réussit totalement sa première œuvre.
Exploitant la veine rare du Merveilleux Victorien, Délius (inspiré d'une chanson de Kate Bush extraite de l'album Never for Ever et de plusieurs poèmes anglais) croise une enquête à la Sherlock Holmes avec l'album des Fées Séchées de Lady Cottington et une version parfumée du mythe de Jack l'Éventreur.
C'est une véritable débauche de sensations, de lumières, de poésie, additionnée d'une pointe de cruauté venimeuse à laquelle nous entraîne Bertrand Lacejambe, botaniste facétieux spécialiste de la fleur enchantée — et son Watson, Fenby, obsédé par les fées depuis qu'une rencontre avec celles-ci lui a fait perdre dix ans de sa vie. Le roman tout entier est une constellation de scènes marquantes, alternant l'ivresse du Bal de la Symphonie Fantastique avec un raid de ramoneurs à la Mary Poppins (en moins mignon), une expérience botanique tout droit sortie de La petite boutique des horreurs, ou encore cette affreuse vision du refuge abandonné des fées — sans oublier des vertiges à la Lewis Carroll et jusqu'à, même, un usage du chemin de fer typique des serials des années 20.
Et tout se tient, rien ne semble inutile. L'impression d'ensemble est parfaite et délicate, joyeusement caricaturale par instant et extraordinairement réussie. La couverture est remarquablement fidèle à ce sentiment.
Conclusion : à moins d'être allergique à la Fantasy Victorienne (et à la noirceur irrémédiable sous-jacente à ce monde rêves et d'enchantement), achetez Délius. Vous ne le regretterez pas.