Stéphane PRZYBYLSKI
DENOËL
272pp - 22,00 €
Critique parue en avril 2025 dans Bifrost n° 118
2017, Proche-Orient. La préhistorienne Rachel Avital découvre en Israël un crâne de jeune femme. Mais à peine a-t-elle le temps de dissimuler sa trouvaille qu’elle est recrutée par un homme au fort accent russe, puis enlevée par un mercenaire américain aux allures de cow-boy pour traduire depuis l’araméen un parchemin supposé expliquer les origines des croyances et réunir les principales religions monothéistes.
Dix mille ans plus tôt, la jeune chasseresse Rarælle, fille du chef Semyaza, se refuse au mariage qu’on cherche à lui imposer. Venant en aide à un Veilleur, ces êtres quasi-divins qui normalement ne s’adressent qu’aux Gardiens, elle part pour un voyage vers les sept montagnes où le soleil se lève. Mais les Veilleurs sont-ils vraiment ce qu’ils prétendent être ?
Dans des temps bien différents, liées par ce mystérieux parchemin, les deux femmes sauront-elles faire face aux dangers qui les menacent et tracer leur propre route ?
Après avoir réécrit l’histoire de la Seconde Guerre mondiale dans la « Tétralogie des Origines » (Le Bélial’, 2015-2017), et revisité l’ère napoléonienne dans Burning Sky (Denoël, 2023), Stéphane Przybylski remonte cette fois bien plus loin dans le temps, s’intéressant aux origines des principales religions monothéistes, plus de huit mille ans avant notre ère.
Entre thriller d’espionnage, roman d’aventure et récit de science-fiction, Des siècles et des siècles nous entraîne sur les traces de deux femmes en quête de liberté, luttant pour leur vie et leur futur, à dix millénaires d’intervalle, et pourtant bien plus proches l’une de l’autre qu’on ne pourrait le penser. Riche, féministe, engagé et historiquement très recherché, ce roman a le double avantage de proposer des personnages particulièrement attachants, et un déroulement aussi palpitant qu’instructif. La découverte de l’histoire de Rarælle en même temps que Rachel, les interruptions auxquelles cette dernière fait face, les dangers qui la menacent et la passion qu’elle met dans la lecture de ce manuscrit, rythment le récit et font du roman un page turner tout ce qu’il y a d’efficace. Il est cependant à déplorer que les nombreux renvois à des notes de fin d’ouvrage obligent à des allers-retours parfois peu utiles, coupant la lecture à des moments clefs. Et aussi, surtout, que certains faits auraient mérité de plus amples explications, non apportées en fin de récit, d’où une certaine frustration du côté du lecteur. Reste que si Stéphane Przybylski n’a ni l’abattage ni la démesure du Tim Powers des Puissances de l’invisible, son Des siècles et des siècles reste une lecture agréable, intelligente sans pour autant être dénuée d’action, et fort fréquentable pour une large frange d’amateurs, du fan de SF ou de thriller, voire de roman historique.