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Les critiques de Bifrost

En attendant l'orage

En attendant l'orage

Graham JOYCE
BRAGELONNE
320pp - 20,30 €

Bifrost n° 43

Critique parue en juillet 2006 dans Bifrost n° 43

Après Lignes de vie en septembre 2005, encensé par la critique, récompensé par le World Fantasy Award et que, pour ma part, je n'avais pas réussi à finir, vaincu par l'ennui, voilà que les éditions Bragelonne publient, quatre mois plus tard, un second livre de Graham Joyce : En attendant l'orage. Nous sommes en Dordogne et c'est l'été. Sept anglais envahissent une grande bâtisse transformée en villa de location ; il y a deux couples, la maîtresse d'un des hommes (celui qui a le plus d'argent), et deux enfants, dont une adolescente, Jessie, particulièrement perturbée et visiblement très impressionnable. Entre les cinq adultes, quelques jours suffisent pour que la tension monte ; les vacances sont alors menacées par un orage qui approche, des nuages noirs — mensonges, non-dits — qui s'accumulent et promettent une pluie pour le moins ravageuse. L'air sent la mort, le danger. Quelqu'un va mourir, mais qui ?

En attendant l'orage est à mon sens un des tout meilleurs romans de l'auteur, c'est aussi un des romans les plus typiques de la manière « Graham Joyce », c'est-à-dire une œuvre de littérature générale dans laquelle ont été distillés divers éléments fantastiques plus ou moins appuyés qui participent de l'intrigue plutôt que d'en peupler la périphérie. Evidemment, on pourrait faire quelques reproches à l'auteur, notamment d'avoir utilisé une ficelle de littérature de gare pour cacher aux lecteurs, le plus longtemps possible, l'identité du « professeur » de Jessie, mais bon, malgré cette ficelle qui manque d'élégance et quelques longueurs, En attendant l'orage s'impose surtout comme un excellent livre fantastique, cruel et pervers, un summum du suspens psychologique qui nous ramènerait presque à Henry James. On y découvre aussi un auteur-voyageur très à l'aise avec la description d'un pays qui n'est pas le sien, en l'occurrence la France (chose malaisée s'il en est, il suffit de se souvenir du pataud Bois de Merlin de Robert Holdstock).

On signalera en outre une traduction invisible et respectueuse, du travail d'orfèvre dû à une Mélanie Fazi en grande forme.

À une époque où de moins en moins de romans fantastiques sont publiés, à l'heure de la mort annoncée de la dernière collection poche dédiée au domaine (« Thriller fantastique » au Fleuve Noir), celui-ci est tout à fait recommandable.

Thomas DAY

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