Ophélie BRUNEAU
AD ASTRA
220pp - 17,00 €
Critique parue en avril 2012 dans Bifrost n° 66
Les éditions Ad Astra, dont on a pu notamment apprécier jusque-là le travail autour de Christian Léourier et Jean Millemann, donnent cette fois sa chance à une jeune auteure, Ophélie Bruneau, dont c’est ici le premier roman. Un vaisseau spatial d’exploration terrien se retrouve propulsé au cœur d’un conflit qui le dépasse quelque peu : dans un système solaire lointain, deux planètes se disputent la suprématie sur une troisième, riche en minerais. N’ayant pas vocation à arbitrer ce type de confrontation, le capitaine du Viking, Jean-Frédéric Serrano (!), devra néan-moins s’y atteler pour sauver la vie de l’un de ses membres d’équipage, fait prisonnier par l’un des camps antagonistes.
Space opera de la plus classique facture, cousin lointain de Star Trek, Et pour quelques gigahertz de plus… se lit sans déplaisir grâce à un sens du rythme assez bien maîtrisé. Les péripéties s’enchaînent convenablement, les rebondissements relancent l’intérêt, bref, de ce point de vue, Ophélie Bruneau s’en sort avec les honneurs. Ce qui n’empêche pas le bât de blesser sur plusieurs aspects : tout d’abord, les personnages sont réduits à de simples caricatures sans réelle épaisseur. Ceci vaut autant pour les êtres humains que pour les extraterrestres, desquels l’auteure ne tire pas tout le potentiel disponible. Faute de creuser suffisamment (notamment, sur le rapport des habitants de Ninsat, l’ancienne colonie devenue indépendante, avec la planète-mère), alors qu’elle avait pourtant planté quelques bases intéressantes, Bruneau ne parvient jamais à nous donner à voir des extraterrestres crédibles.
Se plaçant ouvertement sous l’influence de Douglas Adams (et de Babylon 5 et Galaxy Quest, d’après la quatrième de couverture), la romancière découvre aussi qu’il n’est jamais évident de faire rire, même avec la meilleure volonté du monde. Si l’on sourit parfois, si l’on trouve quelques répliques plutôt bien senties, on sera moins indulgent sur d’autres passages, comme certaines idées étirées jusqu’à les vider de toute substance (le jeu vidéo…). Il est vrai que l’humour est une chose difficile à maîtriser en littérature… En outre, le livre oscillant entre ce nonsense et une trame un peu plus sérieuse, on a le sentiment que l’auteure n’a jamais réussi à concilier les deux et se retrouve in fine aux prises avec un roman qui échoue à trouver son équilibre : les enjeux dramatiques sont escamotés du fait de cet humour nonchalant alors même que Bruneau, désireuse de raconter une histoire qui se tienne, ne lâche jamais la bride côté drôleries.
On l’aura compris, Et pour quelques gigahertz de plus…, sans être déshonorant, reste malgré tout une tentative bancale sur de nombreux points. De fait, au-delà de ce premier roman, on patientera quelque peu pour se faire une idée plus précise du potentiel d’Ophélie Bruneau.