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Les critiques de Bifrost

I. AM

Grégory AIMAR
MASSOT
272pp -

Critique parue en octobre 2020 dans Bifrost n° 100

Avoir une bonne connaissance d’un sujet ne suffit pas pour faire un bon roman. Loin de là. Grégory Aimar en apporte la preuve avec I. AM qui, sous couvert de fiction, cache mal un réquisitoire contre le transhumanisme en général et les travaux de Google et sa maison-mère Alphabet. Le tout avec un style faisant passer Gérard de Villiers et ses « SAS » pour de la prose raffinée. Pourtant, l’idée de base est intéressante. Son personnage principal, rentier visiblement affligé de dépression et d’alcoolisme chronique, décide un jour de se greffer une interface neurale, I.AM, qui va le lier à MAIA, une intelligence artificielle ayant la mainmise sur Internet et l’ensemble des objets qui y sont connectés. Il rejoint alors la tribu des anthropotechs, se coupant ainsi de ses rares proches. Et si la nouvelle réalité n’était pas aussi rose que ce que lui laissaient miroiter les publicités ? Et quelle réalité ? Celle de son corps physique se robotisant de plus en plus ou celle qu’il connaît au sein de MAIA ?

Sur le fond, l’autrice de ces lignes est bien gênée, car globalement en accord avec le point de vue de l’auteur concernant les risques potentiels du transhumanisme. Notamment, elle a bien conscience que la façon dont la recherche est menée à ce sujet par Google, Neuralink d’Elon Musk et d’autres, ne tient pas assez compte des risques élémentaires, communs à tout élément connectés : le piratage, l’infection et la corruption des données. Sans parler des biais de perception dans les systèmes technologiques actuels liés au manque de diversité tant des équipes que des sujets fournissant les échantillons.

Mais sur la forme… I. AM est indigeste. Écrit à la première personne, le livre met le lecteur dans la peau de Damian, qui n’est pas le narrateur le plus sympathique qui soit. Vain, misogyne, ne pensant qu’à son petit plaisir personnel, il ne donne ni envie de le suivre, ni de comprendre son évolution. D’autant que le texte se permet des considérations pseudo-philosophiques ou mystiques dignes d’une soirée arrosée entre étudiants de première année, et se perd en digressions techniques et notes de bas de page inutiles. Le tout enrobé dans une fétichisation malsaine d’une certaine frange de la culture japonaise, qui rend au final la lecture de ce I. AM franchement pénible.

Stéphanie CHAPTAL

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