« Jeune aspirant au service de l'Empire de lumière, Cellendhyll de Cortavar a été trahi par ses amis et accusé de meurtre. Laissé pour mort dans un cachot, il n'a dû sa survie qu'à l'intervention des puissances du chaos. Dix ans ont passé. Le jeune homme idéaliste est devenu un mercenaire impitoyable. Il n'attend qu'une chose : se venger de ceux qui l'ont trahi. »
Si je reproduis ci avant le début du quatrième de couverture de L'Ange du chaos, la première aventure de Cellendhyll, c'est tout simplement parce que ces quelques lignes en résument assez bien l'intrigue et aussi parce qu'une paresse certaine accompagne mon accablement de lecteur survivant. Je n'ai presque rien à dire de positif sur cette série B étiquetable « 0% talent, 0% originalité ». Elric a été mal pompé, bonjour la débandade : le style est au mieux efficace, la plupart du temps dégueulasse et parfois même inepte ; certaines scènes sont tellement ridicules qu'il y a de quoi balancer l'ouvrage dans sa cheminée en redoutant toutefois qu'il explose. Je pense en particulier à ce que j'appellerai « la scène du feu » pp. 93-94 : imaginez, vous êtes poursuivi par des gens qui veulent vous tuer, vous tombez dans une rivière en furie (vous êtes donc mouillé de la tête aux pieds, d'accord ?), vous sortez de la rivière, transi de froid, et, alors que vous êtes toujours poursuivi et détrempé, vous allumez un feu (comment ? avec des silex, du bois, un zippo, le joint de David Calvo qui passait par là ?) sous un dôme de verdure. Un feu qui prend malgré la pluie, crépite, et ne fume pas, malgré l'humidité ambiante ? Un feu… magique, moi je vous le dis ; je connais des scouts qui vont être jaloux. Et ce n'est qu'une scène jouissive parmi tant d'autres.
On regrettera aussi qu'à son troisième roman publié, Michel Robert ne sache toujours pas ce qu'est un point de vue (ah, le charme délétère des flash-back en style bancal omniscient !), sans oublier de pleurer sur la grammaire aléatoire, la présence de coquilles, nombreuses, de scènes de cul, à peine moins nombreuses et surtout sexy comme l'apparition subite d'un chorizo extra-fort derrière la vitrine du rayon charcuterie de votre Auchan préféré. Sans oublier un soupçon de sadomasochisme à la Froideval et une fort goûteuse branlette attisée par le spectacle de bohémiennes et de leurs enfants massacrés par des démons. Cette purée indigeste, à accompagner d'un vin de table qui pique les yeux, m'a rappelé la nullité abyssale des premiers romans de Jacques Sadoul, où, entre autres conneries, Chtulhu fouettait des femmes soumises, minou aux quatre vents ; putain ce qu'il était (et reste) fort, ce Sadoul romancier, ce John Norman du pauvre ; une carrière exemplaire, mais il faut qu'il se méfie de la concurrence… elle commence à être rude.
Quant au second volume des aventures de Cellendhyll, Cœur de Loki, je l'ai certes ouvert, mais, totalement rebuté par sa taille et le style de ses premières pages, je me suis contenté d'en noter la pagination afin de pouvoir mettre un point final à cette recension… car, croyez-moi ou non, les bons livres ne manquent pas en ces temps de surproduction.
Histoire de soulager la peine compréhensible de l'éditrice (mais qui sait, ce truc poubellomoorcockien se vend peut-être comme des petits pains ?), on notera la beauté sombre des deux couvertures de Julien Delval, des illustrations d'une rare efficacité, superbes dans leur genre…