Jonathan CARROLL
DENOËL
331pp - 20,85 €
Critique parue en juillet 1998 dans Bifrost n° 9
Weber Gregston, écrivain de renom, est amené à terminer le film d'Horreur de son ami Philip Strayhorn, qui s'est suicidé pour de mystérieuses raisons. La cassette vidéo qu'il lui lègue ne se laisse lire que progressivement, au fur et à mesure que Weber progresse dans la connaissance du projet de Philip, qui touchait à la connaissance divine. Mentor dérangeant, une petite fille enceinte qui prétend être un ange l'avertit qu'une scène du film risque de libérer des forces maléfiques si elle n'est pas retrouvée et modifiée. En fait, elles sont déjà à l'œuvre : les proches de Philip décèdent ou sont atteints d'un cancer. Il n'est pas certain non plus qu'on puisse faire confiance à cet ange qui apparaît et disparaît mystérieusement.
La quête de Webster, dictée par l'urgence, est ardue tant les faux-semblants, les signes ésotériques brouillent sa lecture des événements. L'écrivain est amené à la connaissance de soi en tentant de percevoir la personnalité réelle de Philip, dont il ne réalise que progressivement combien celui-ci l'a plagié. La réalisation du film le pousse à réfléchir à la nature du mal, à ce qui fait son essence. Dans le même temps, le récit qui abonde en références cinématographiques présente de manière fort convaincante l'univers du cinéma hollywoodien et plus particulièrement du film d'Horreur.
Fantasmatiques, allégoriques, les romans de Jonathan Carroll ne ressemblent à nul autre et appartiennent à cette catégorie rare de Fantastique qui privilégie l'épouvante du mouvant et de l'incertain à l'horreur des gesticulations grand-guignolesques.
Réflexion sur la mort, l'âme et le mal, ce roman se situe dans le droit fil de La Morsure de l'ange précédemment paru dans la même collection.