James S.A. COREY
ACTES SUD
608pp - 23,80 €
Critique parue en octobre 2014 dans Bifrost n° 76
James S. A. Corey, également connu comme Daniel Abraham et Ty Franck, nous est présenté comme l’assistant de George R. R. Martin, et la série « The Expanse », dont le présent volume figure le tome initial, un « Trône de fer » de l’espace… Qui dit Martin dit « Trône de fer », OK. Mais en l’occurrence, c’est quand même aller vite en besogne. Ce qui nous est ici livré est bien un NSO (nouveau space opera), et d’ores et déjà une tétralogie en VO.
Ce premier volume est construit sur deux lignes narratives correspondant aux deux personnages principaux : Joe Miller, un flic de Cérès qui recherche Julie Androméda Mao, et Jim Holden, un astronaute accompagné de Naomi, Alex et Amos, les survivants du Canterbury. Deux lignes qui ne tarderont pas à s’entortiller l’une autour de l’autre avant de diverger plus ou moins de nouveau…
Force est d’admettre que le début de la trame concernant Holden est pour le moins confus et que les questions que le lecteur peut légitimement se poser restent pour beaucoup sans réponses. Tout commence lorsque le Canterbury reçoit un appel de détresse du Scopuli, astronef sur lequel naviguait Julie Mao. Mais cet appel dissimule un piège et le Canterbury est atomisé par un vaisseau furtif. Pourquoi ? On ne sait. Pourquoi ces agresseurs impitoyables n’achèvent-ils pas la chaloupe de Holden ? Pourquoi le Scopuli a-t-il lui aussi été attaqué et abordé ? Ces événements ont pour conséquence de déclencher un conflit entre Mars et la Ceinture d’Astéroïdes. Amos pose d’ailleurs ces questions au bas de la page 290. Après que la chaloupe de Holden a été recueillie par le vaisseau amiral de la flotte martienne, le Donager, celui-ci est à son tour attaqué et détruit sans explication. Par la Terre qui va se retrouver impliquée dans le conflit en raison de ses connivences avec la firme Protogène. Holden parvient encore à s’enfuir à temps à bord d’une corvette rebaptisée Rossinante. Plus tard, Holden retrouvera le vaisseau qui a attaqué le Scopuli et que Julie Mao a quitté avec une navette abandonné près d’un astéroïde sans que l’on sache le motif de cette attaque.
Il est regrettable de n’avoir pas ces réponses au terme des 620 pages de ce premier volume, d’autant que l’évolution de la situation laisse présager que l’on n’y reviendra pas. On n’a pas non plus d’explication satisfaisante sur les raisons qui poussent Fred Johnson à envoyer Holden et le Rossinante sur Eros pour en exfiltrer une personne qui s’avérera être Julie Mao, mais qu’ils découvriront morte selon les standards humains. Protogène ignorant la présence de Mao dans un hôtel d’Eros, on ne comprend guère les raisons de la fusillade qui s’y déroule et permet la rencontre de Holden et Miller.
Si l’on parvient à faire abstraction de toutes ces questions initiales sans réponses, les péripéties s’enchaînent sans temps mort jusqu’à la révélation finale.
À l’arrière-plan, on a une société, Protogène, qui a découvert sur Phoebé, le satellite de Saturne, un virus extraterrestre venu des espaces interstellaires deux milliards d’années plus tôt et destiné à atteindre la Terre pour y altérer l’évolution de la vie. Escomptant en tirer puissance et pouvoir, les gens de Protogène ne répugnent pas à l’assassinat de masse de toute la population d’Eros et envisagent froidement de jouer l’existence de l’humanité dans un terrible banco.
L’Eveil du léviathan fonctionne bien en dépit des questions sans réponses irritantes, mais que l’on peut shunter en lisant l’aventure pour l’aventure. Livre de plage pour inconditionnels du space opera, on n’en fera toutefois pas une priorité.