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Les critiques de Bifrost

L'Exil des Mécréants

Tito TOPIN
LA MANUFACTURE DE LIVRES
188pp - 15,90 €

Bifrost n° 87

Critique parue en juillet 2017 dans Bifrost n° 87

Dans un futur indéterminé mais ressemblant à notre présent, croire est devenu obligatoire. Dieu, Allah, Yahvé, nul n’échappe désormais aux diktats de leurs zélotes. Et si l’on montre le moindre signe de mécréance, l’internement dans un centre d’inoculation de la foi apparaît comme le seul viatique. Libre penseur et journaliste, Boris a écrit un article trop critique sur le cardinal présidant la France. Réfugié dans la clandestinité, pourchassé par la police, il prend la route de l’exil, direction l’Espagne et plus loin encore vers des terres moins rigoristes pour les athées, rationalistes et autres sceptiques. Il ne se sait pas encore que la hiérarchie catholique lui a collé un tueur aux basques.

Le péril théocratique appartient aux futurs cauchemardesques échafaudés par une science-fiction plus attirée par la dystopie que par les perspectives d’un avenir ouvert à la multiplicité des possibles. Habitué au polar, Tito Topin vient ajouter sa pierre au mausolée d’une humanité jamais en manque d'imagination pour asservir son prochain. Une imagination ayant fait hélas défaut à l’auteur français avec ce roman. L’Exil des mécréants se contente en effet d’enfoncer les portes ouvertes, déroulant un récit poussif, convenu et au final très mauvais. L’anticipation, superficielle tant elle paraît calquée sur le présent, se révèle un prétexte perclus de poncifs pour illustrer une sorte de road novel relâché n’entretenant même pas l’illusion du suspense. L’intrigue, prévisible au possible, tient toute entière sur un extrait de baptême que l’on aurait envie de faire avaler à son auteur tant elle semble animée par un état d’esprit anti-calotin caricatural. Linéaire et sans véritable souffle, elle génère un ennui pesant, à peine tempéré par des rebondissements bâclés dont le dé roulé ne provoque qu’un agacement croissant au fil des pages. Seule la gouaille, un goût prononcé pour le sarcasme vachard, perceptible dans le traitement des personnages, égaie ce roman et écarte la tentation d’un abandon prématuré tout en nourrissant l’espoir que peut-être… Ce qui semble bien maigre au regard des attentes suscitées par l’argument de départ.

Bref, L’exil des mécréants ressuscite le pire de la collection « Ici et maintenant » des défuntes éditions Kesselring, autrement dit une politique-fiction au propos grossier, à l’intérêt limité, alourdie de surcroît par une intrigue plan-plan. Même un épisode de la série Navarro apparaît plus palpitant. C’est dire…

Laurent LELEU

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