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Les critiques de Bifrost

La Geste d'Hamlet Evans

Rafael MARIN
ARGYLL
432pp - 24,90 €

Critique parue en octobre 2024 dans Bifrost n° 116

Troisième Moyen Âge, dans notre galaxie. La puissante Corporation conquiert planète après planète, rayant toute rébellion de la carte, tandis que des poètes retracent par d’épiques textes les exploits des soldats, érigeant ces derniers en véritables héros. Le jeune Hamlet Evans, que tout destinait à rester dépérir sur la Terre mère à l’agonie, est repéré et choisi pour devenir l’un de ces poètes. Pourtant, nommé sur l’un des vaisseaux de première ligne, il déchante vite. Nul combat grandiose, nulle trace d’héroïsme ne viennent ponctuer les batailles. Seules l’horreur, la mort, la destruction l’attendent. Refusant de nourrir la propagande, Hamlet tourne le dos à la Corporation. Pourchassé, il fuit alors de monde en monde, tantôt mendiant, paysan, comédien ou clown, à la recherche d’une liberté qu’on lui refuse. Mais cette liberté existe-t-elle seulement ?

Rafael Marin nous entraîne ici sur les pas d’un poète de l’espace, un homme qui n’est ni un commandant, ni un scientifique. Totalement dépassé par les événements, parfaitement incompétent dans les domaines du combat comme du pilotage, le protagoniste est d’autant plus attachant que chacun peut se reconnaître en lui. L’intérêt de l’histoire réside surtout dans la capacité qu’a Hamlet Evans à refuser de se trahir, de trahir ses idéaux et ses principes, malgré sa lâcheté manifeste, et même s’il doit pour cela se faire l’ennemi de la Corporation.

Malgré quelques prises de position, certes engagées pour l’époque (le roman date de 1984), mais un peu vieillies (on pense notamment au traitement de la femme, qui reste au plan d’objet sexuel malgré une volonté manifeste de montrer une arrivée au pouvoir de certaines d’entre elles, ou encore à celui de l’homosexualité, présentée comme normale à l’époque du récit, mais avec une insistance telle que c’en devient assez lourd), le roman reste dans l’ensemble une lecture agréable. Le voyage, de planète en planète, dans la tête de ce personnage atypique et imparfait, très ouvert sur ses pensées, ses émotions, ses réflexions, se poursuit avec plaisir. Sans révolutionner le space opera, La Geste d’Hamlet Evans saura sans doute satisfaire les inconditionnels du genre à la recherche d’une lecture confort.

 

 

Éléonore BAILLY

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