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Les critiques de Bifrost

La Gloire à tout prix

Emily TESH
BRAGELONNE
25,00 €

Critique parue en octobre 2024 dans Bifrost n° 116

Premier roman de la Britannique Emily Tesh, La Gloire à tout prix nous emmène dans un futur lointain. La Terre et ses quatorze
milliards d’habitants ont été anéantis par le Majoda, une coalition de races extraterres- tres se servant d’une machine surpuissante, la Sagesse. Une partie des survivants a trouvé refuge sur Gaïa, un planétoïde en partie formé par quatre cuirassés endommagés. Dans cet environnement spartiate prospère depuis une douzaine d’années une société hiérarchisée et militarisée portée par un sacré esprit de revanche : « Tant que nous vivrons, l’ennemi nous craindra. » Les jeunes sont endoctrinés pour faire partie de l’une ou l’autre des équipes : celle qui ira au combat, celle qui s’occupe de produire de la nourriture, celle qui s’occupe de pondre des bébés à la chaîne. Tout juste sortie de l’adolescence, Kyr est une guerrière d’exception, la meilleure de sa cohorte, à l’instar de son frère Magnus. Hélas, lorsqu’ont lieu les affectations qui vont déterminer leur avenir, elle a deux désagréables surprises. D’une part, Magnus disparaît — a-t-il déserté, comme leur sœur aînée, ou rejoint un escadron secret ? D’autre part, elle est affectée en maternité, condamnée à enchaîner les grossesses pour fournir Gaïa en futurs guerriers. Kyr prend alors une décision radicale : fuir la station et retrouver son frère. La jeune femme ne sera pas au bout de ses surprises...

La Gloire à tout prix fait mine de commencer comme un space opera militariste, pour mieux dévier en chemin et démonter de l’intérieur la société de Gaïa, mélange entre Sparte et la Corée du Nord, avec un maximum de bonnes intentions. Si le début fonctionne, Emily Tesh se prend les pieds dans le tapis dès lors que Kyr quitte la station : un lot de coïncidences improbables, des rebondissements drastiques qui aboutissent à pas grand-chose, des dialogues patauds, des personnages post-ados sans aspérités, aux sentiments dits mais jamais montrés, et dont les questionnements d’identité sexuelle sont amenés avec la légèreté d’un tank. On a envie de supposer l’univers mis en place riche et fouillé, mais il demeure vague, et l’autrice se livre à des approximations agaçantes lorsqu’il est question de science-fiction (parle-t-on d’une civilisation interstellaire ou intergalactique ?). Les technologies mentionnées ressemblent plus à des paravents pour de la magie (oui, oui, la 3e loi de Clarke, mais quand même !). Hésitant entre les cases marketing du roman adulte et du young adult, La Gloire à tout prix reste insatisfaisant en tous points, et ce n’est pas l’attribution du prix Hugo qui y changera grand-chose.

 

 

Erwann PERCHOC

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