Parue au début des années 70, sous la forme d'une trilogie comprenant Les Croisés de Mara, Les Monarques de Bi et Lazaret 3, voici la troisième édition de La Grande séparation complétée d'un quatrième tome inédit : Les Ganethiens. Cette nouvelle édition se présente sous la forme d'un fort volume de plus de 640 pages, que ponctue une postface de Roland C. Wagner, tout en affichant un prix attractif de 89 FF.
Plusieurs années avant qu'il ne s'impose au monde de la S-F francophone en lui donnant son œuvre la plus importante en volume (La Compagnie des glaces — environ vingt millions de signes et 62 tomes !), G. J. Arnaud, qui fut invité à la dernière convention nationale de S-F à Lodève (34), avait fait une première incursion dans le genre avec La Grande séparation. Avec 400 romans derrière lui, G. J. Arnaud est un stakhanoviste de l'écriture populaire qui a sévi dans la plupart des genres. Principalement d'ailleurs dans le policier et l'espionnage, où il a donné les aventures du Commander. Récemment, on a pu redécouvrir son œuvre fantastique avec La Dalle aux maudits dans « La Bibliothèque du Fantastique » du Fleuve Noir.
Près de 1000 ans après une terrible guerre galactique qui l'opposa à la Terre, la planète Mara végète dans un moyen-âge obscurantiste d'où la science et le savoir sont proscrits et conduisent au bûcher. Les Ganethiens sont une secte scientiste et prosélyte qui, dans l'ombre, attend son heure… Laur le Négociateur, héros du cycle, est manipulé par les diverses forces en présence. Mandé par les nobles de Vasa pour tuer Dorle le Prophète, chef des Ganethiens, ce dernier à tôt fait de le renvoyer à Vasa pour y soulever ses disciples et prendre la tête de l'insurrection. Mais Dorle n'est pas franc du collier et veut instaurer une théocratie après que les vestiges technologiques qu'il maîtrise lui aient assuré la victoire… Telles sont les bases d'une aventure échevelée qui se déroulera sur plus de 600 pages…
La Grande séparation n'est pas un space opera à proprement parler. Les quatre romans qui la composent sont en fait des romances planétaires. Ils sont typiques — y compris le quatrième — de la production standard du Fleuve Noir « Anticipation » de l'époque où le voyage spatial était un presque incontournable, de même que la guerre, interplanétaire ou pas. G. J. Arnaud, qui n'éprouvait pas le désir de traiter ce sujet, l'a relégué à l'arrière-plan pour s'intéresser à ses conséquences, en trois puis quatre tableaux.
Notons que pour ce livre — et les suivants — le Fleuve Noir a enfin renoué avec le principe de la bande titre qui fut à « Anticipation » ce que les trois bandes sont à Adidas, comme si les commerciaux de la maison venaient soudain de saisir ce qu'est une marque ! Emblème de la collection du milieu des sixties au début des années 90, sa disparition en avait sonné le glas… Avec en prime une illustration de Caza pour le retour.
C'est un gros roman d'aventures, où le fond n'a pas été négligé, que nous tenons là ; un bon représentant de ce qu'était la collection « Anticipation » d'alors, qui a plutôt bien vieilli. Typique tout en comptant parmi les meilleurs.