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Les critiques de Bifrost

La Louve et l'enfant

La Louve et l'enfant

Henri LOEVENBRUCK
BRAGELONNE
16,60 €

Bifrost n° 23

Critique parue en juillet 2001 dans Bifrost n° 23

Après l'écriture de Pelot, celle d'Henri Loevenbruck à toutes les chances de paraître calamiteuse. Objectivement, elle est lumineuse par moments, pompeuse et relâchée le reste du temps (page 12, on lira quatorze fois le verbe « être » sous sa forme « était »…). Le principal défaut stylistique de l'auteur réside dans son impossibilité à créer la moindre tension. La Louve et l'enfant est le premier volume de « La Moïra », nouveau cycle de fantasy francophone (on en manquait !), qui narre les aventures d'Aléa, sorte de Cosette irlando-asiatique et de la louve Imala à travers la Gaelia (une Irlande soft qui sent à peu près autant l'Irlande que la Guinness sent le Nuoc Mam). Au bout d'un certain moment, Obiwan Kenobi rejoint l'aventure — sous le pseudonyme de Phelim, certes, mais on n'a pas de mal à reconnaître le vieux cachottier. Le plus désespérant, dans ce livre, en dehors de son côté gnan-gnan, ce sont les personnages, creux, convenus, déjà vus. Et principalement Aléa, dont on espère à chaque page que sa route finira par croiser celle d'un troll pédophile particulièrement bien monté. Du côté de l'histoire (le plus important ?), La Louve et l'enfant mérite le prix du livre de fantasy le moins original de la décennie. Le tout pour 110 francs, cherchez l'erreur… À l'instar de Nicolas Jarry (Le Loup de Deb et ses suites — Mnémos) ou encore de Matthieu Gaborit (Cœur de Phénix), Henri Loevenbruck échoue à produire une œuvre de fantasy médiévale palpitante — on est bien loin de La Trilogie des Elfes, de Jean-Louis Fetjaine. Dommage. On hasardera toutefois une explication possible : là où Fetjaine fait crépiter son doctorat d'Histoire, Loevenbruck utilise trois ans d'expérience de rédacteur en chef à Science-Fiction Magazine (un « magazine culturel », apprend-on en quatrième de couverture, sans doute un clin d'œil appuyé aux fans éplorés de la rubrique « Sexe, pizzas et vidéos » — dont j'avoue avoir toujours fait partie). On constate donc, une fois de plus, que les auteurs français parviennent à écrire de bons livres de fantasy non médiévale (la renaissance chez Kloetzer, les îles chez Denis Duclos) mais échouent en général, faute d'érudition et de travail, à nous plonger dans un Moyen Âge crédible à même de rivaliser avec les fresques anglo-saxonnes, telles celles de Robin Hobb ou George R.R. Martin, par exemple.

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