Vous aimez la prose d’Alastair Reynolds ? Vous aimez Doctor Who ? Alors épargnez-vous toute souffrance et reposez immédiatement ce livre. Ne l’achetez pas, ne l’empruntez pas… sauf si vous avez besoin d’un somnifère puissant et que la pharmacie la plus proche est fermée. La Moisson du temps est la preuve que deux fleurons de la SF britannique ensemble ne font pas forcément un mélange supportable à la lecture. La fantaisie du Docteur (surtout dans cette incarnation, la troisième, peu connue des lecteurs francophones les plus jeunes qui ont découvert la série avec sa relance en 2005) et les invraisemblances de son univers ne correspondent pas au style d’écriture d’Alastair Reynolds, plus précis, ni à son lectorat habituel plus féru de hard SF. D’autant que l’histoire en soi n’est pas particulièrement originale pour un épisode de Doctor Who, ni assez rythmée pour donner envie de tourner les pages et de découvrir la suite. Même la résolution finale s’avère ultra-classique, et la révélation de l’identité de la Reine rouge n’en est pas franchement une. Et du côté de l’univers du Docteur ? Nous retrouvons dans une histoire écrite au XXIe siècle un personnage dont la dernière apparition à la télévision date de juin 1974, avec une des compagnes les moins palpitantes qui soient. En effet, si la candeur de Jo Grant fonctionnait à merveille à l’écran pour que le spectateur découvre l’univers du Docteur, en livre, elle se révèle plutôt laborieuse et ressemble à une énorme note de bas de page ambulante. D’autant plus que les événements obligent par ailleurs à rappeler sans cesse qui est le Maître, ce que sont les Seigneurs du Temps, comment fonctionne le voyage temporel, etc. Au bout du compte, ce n’est plus un roman ludique, mais un manuel scolaire ! Et quitte à créer une nouvelle race extraterrestre pour l’occasion, Alastair Reynolds aurait certainement pu faire plus original que la version marine lilliputienne des Daleks. Vous l’aurez compris, hormis l’envie de faire une recension complète des œuvres d’Alastair Reynolds ou des produits dérivés de Doctor Who, la lecture de ce bouquin n’a rien de nécessaire.