Tout commence par des cauchemars ceux que raconte un agent de voyage anglais, Ian McGann, à Jesse Chapman, un américain travaillant à Vienne. McGann a rencontré un messager de la Mort, qui répond à toutes les questions… mais fait payer un prix terrible à ceux qui ne comprennent pas les réponses. Ni McGann ni Chapman pourtant ne sont des personnages principaux, et le livre suit deux itinéraires bien différents : ceux de Wyatt Leonard, ex-présentateur de télévision pour enfants, atteint d'une leucémie, et d'Arlen Ford, célèbre actrice et sex-symbol désormais retirée du monde du spectacle.
Sophie, la sœur de Jesse, catastrophée par la disparition de son frère, convainc Wyatt, son meilleur ami, de l'accompagner à Vienne — où Arlen a établi sa résidence, loin du show-biz californien.
Les personnages se croisent, de façon fortuite ou non, prennent le thé dans les fameuses pâtisseries viennoises, et même leurs conversations avec la Mort sont singulièrement dépourvues de tension dramatique. Si on ne peut gagner contre la Faucheuse, la morale du roman est que la victoire des vivants réside dans leur capacité à Lui voler leur bonheur de l'instant, à L'oublier un moment : rien de renversant.
Mais, fidèle à ce point de vue, le livre n'est jamais aussi intéressant que lorsqu'il rend la texture de la vie de ses personnages. Ce qu'il fait en détail, avec brio même, et sans jamais ennuyer. Carroll aurait sans doute pu vendre ce livre comme de la littérature générale, et il convenait parfaitement à la défunte collection « Présences » où il est paru initialement. On est ici à cent lieues des auteurs que Pocket publie industriellement (comme Koontz ou Masterton), mais ce sont ces joyaux isolés (rappelez-vous Méchant Garçon de Jack Vance) qui font pour moi le charme de la collection « Terreur ».