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Les critiques de Bifrost

La Peste du léopard vert

La Peste du léopard vert

Walter Jon WILLIAMS
LE BÉLIAL'
128pp - 10,90 €

Bifrost n° 112

Critique parue en octobre 2023 dans Bifrost n° 112

Le Futur. La famine, la pauvreté ont été abolies, et même la mort n’est plus qu’une contrariété passagère quand la nanotechnologie peut recréer votre corps ravagé et qu’une sauvegarde de votre mémoire et de votre personnalité peut y être placée. Dans ce monde situé quelque part entre ceux de Geoff Ryman, la propre production de Williams (on pense à certains éléments du bien trop méconnu Avaleur de mondes) et Iain M. Banks, on peut adopter une forme simiesque un temps, puis se reconfigurer en sirène pour pleinement apprécier la vie dans les Chelbacheb, un archipel micronésien. C’est ce qu’a fait la protagoniste, Michelle, qui a un don pour fouiller les archives informatiques de notre propre époque et y dénicher les détails qui manquent aux biographes. Et justement, la vie de Terzian, obscur conférencier, qui, brusquement, a émis une théorie révolutionnaire en partie à la base du changement de paradigme socio-économique radical subi par la Terre, présente un trou de quelques semaines cruciales : il fait à Paris un discours mineur, disparaît, revient à Venise… et change le monde. Que s’est-il passé ? C’est ce que Michelle va découvrir dans la trame principale du récit, qui se déroule principalement dans notre présent, tandis qu’une seconde trame, plus subtile (pour ne pas dire retorse) y est enchâssée, concernant cette fois le présent de Michelle, à savoir notre futur – vous suivez ? Car dans cette société post-pénurie de prime abord aussi utopique que celle de Star Trek, dans cet Éden qui semble avoir laissé derrière lui tous les maux de notre triste époque, le serpent s’est, une fois encore, glissé !

Exploitant les doubles trames entrelacées dont la rumeur dit qu’Olivier Girard, le directeur de la collection « Une heure-lumière », serait friand, l’histoire de Terzian est plus stimulante d’un point de vue intellectuel qu’incroyablement prenante, et ce même si la façon radicale dont le paradigme sociétal bascule reste tout à fait fascinante. On commence alors à se dire qu’on a peut-être affaire à un « Une Heure-lumière » mineur (oui, ça existe…), quand l’auteur vient nous cueillir d’une façon à laquelle on ne s’attend pas, et qu’on hoche la tête de satisfaction. Soyons clairs : il ne s’agit pas du meilleur texte de Walter Jon Williams (en dépit de son Prix Nebula), et on ne le placera sans doute pas non plus parmi les titres les plus incontournables de la collection où il prend place, mais il s’agit néanmoins d’un court roman plus que fréquentable. D’ailleurs, si vous l’avez apprécié, vous serez ravis d’apprendre qu’il s’inscrit dans un cycle en cours d’élaboration rassemblant à ce jour deux autres nouvelles, dont « Léthé », traduite en français (et où l’on retrouve un personnage secondaire de La Peste…), un cycle que l’auteur a pour l’heure mis de côté faute d’avoir encore réussi à définir avec une précision qui lui convient un de ses éléments clés.

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