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Les critiques de Bifrost

La Petite mort

La Petite mort

Ellen DATLOW, Stephen DEDMAN, Lucy TAYLOR, Harry CREWS, Wayne Allen SALLEE, Nicholas ROYLE, J. Calvin PIERCE, Kathe KOJA, Barry N. MALZBERG, Nicola GRIFFITH, Clive BARKER, M. John HARRISON, Joel LANE, Joyce Carol OATES, Melanie TEM, Ruth RENDELL, Kelle
ALBIN MICHEL
592pp - 22,87 €

Bifrost n° 10

Critique parue en octobre 1998 dans Bifrost n° 10

Après l'anthologie de vampires sexuels concoctée par Poppy Z. Brite, Albin Michel présente un épais recueil de nouvelles érotiques fantastiques d'un excellent niveau, comme en témoigne la qualité des auteurs retenus : Clive Barker, Pat Cadigan, Douglas Clegg, K. W. Jeter, Kathe Koja, Barry Malzberg, Richard Christian Matheson, Lucius Shepard, etc., sans oublier une grande dame du policier, Ruth Rendell.

Dans cette anthologie, il est moins question de sexualité que de relations, tant il est vrai que celle-ci est tributaire de la personnalité des acteurs. On y trouvera bien sûr quelques scènes torrides, des unions charnelles monstrueuses, violentes ou hors normes, un éventail de situations déclinant les figures de l'homosexualité, du sadomasochisme, voire de l'inceste, mais l'essentiel n'est pas là. Comme l'illustrent Koja et Malzberg avec la bizarre relation d'un artiste photographiant les modèles ravissants ou monstrueux, que lui amène une belle collectionneuse de clichés, « La prudente géométrie de l'amour » touche à l'âme. La découverte de l'autre, et parfois sa possession, passent autant par l'esprit que par le corps.

Il est beaucoup question de douleur dans ce recueil ; celle-ci semble même indissociable du plaisir qui provoque le même pincement au cœur. Les motifs d'une sexualité décalée, malade, en quête d'un équilibre qui ne se trouve parfois que hors normes, sont omniprésents. Ils sont typiques d'un fantastique moderne qui a cessé de faire appel au surnaturel dans ses récits, sinon d'une façon très voilée. Les maléfices ne représentent qu'un quart des textes et souvent, tournent autour du ménage à trois : l'amant désireux de récupérer sa femme fait appel à la sorcellerie (« La dernière fois » de Lucius Shepard, excellent !, « Trous » de Sarah Clemens), couples et maris infidèles sont sous l'emprise de maléfices (« Le rocher » de Mélanie Tem) où ils revivent parfois leurs relations coupables (« Boutons de fièvre », de Carol Oates),

Métaphoriques ou crûment réalistes, ces nouvelles frappent fort et juste. Si le fantastique traite souvent de la mort, il était normal qu'il s'intéressât à la petite mort et aux fantasmes qui l'accompagnent. Le lecteur sera au moins assuré que sexe et fantastique font bon ménage !

Claude ECKEN

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