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Les critiques de Bifrost

La Porte des Remparts sublimes

La Porte des Remparts sublimes

Pierre BORDAGE
AU DIABLE VAUVERT
512pp - 23,00 €

Bifrost n° 112

Critique parue en octobre 2023 dans Bifrost n° 112

S’il est bien un nom qu’on ne présente plus dans le paysage de l’Imaginaire francophone, c’est celui de Pierre Bordage. Né en 1955, l’auteur publie depuis plus de trente ans des récits, de science-fiction comme de fantasy, alliant le souffle romanesque à un amour profond pour ses personnages – on pourrait ici le rapprocher d’Orson Scott Card, l’un de ses modèles, avec qui il partage aussi le fait que, les années passant, sa faculté à sur- prendre semble s’être émoussée. Ce qui ne l’empêche pas de continuer à produire des histoires agréables qui savent entraîner le lecteur. À moins qu’il ne faille plutôt dire savaient ? En effet, La Porte des remparts sublimes, son dernier livre, accuse des stigmates plus inquiétants…

Le premier opus de cette nouvelle saga met en scène Sibelle (jeu de mot transparent faisant écho à la beauté de l’héroïne, et peut-être aussi une référence à la déesse phrygienne Cybèle), jeune prostituée dont la virginité est mise aux enchères, et qui ne tarde pas à se retrouver au centre d’un jeu politique et militaire aussi cruel que sanglant. Et c’est parti pour une série érotique de plus, mais qui semble dater du siècle précédent (comme si MeToo n’avait jamais existé). Déjà, dans la trilogie « Métro Paris 2033 » (cf. Bifrost 100, 103 & 107), l’auteur mettait en avant des personnages féminins proches de la divinité, et leur faisait subir des traitements sexuels cruels. Mais ici, il a franchi un cap. À l’instar de certains écrivains qui, l’âge venant, se lancent dans des histoires osées, Pierre Bordage s’enflamme sur la beauté de Sibelle, ses ébats pleins d’enthousiasme et d’allant. Les descriptions de sexes masculins, les « petits soldats », se multiplient, avec force détails. Comme une étude comparative des formes, des tailles et de leurs mérites respectifs dans le « vallon secret » de la jeune femme. Et entre deux parties de jambe en l’air, on complote et on se découpe allègrement.

L’ensemble, d’une naïveté navrante, échoue à convaincre. Récit érotique raté, lourdaud, parfois un peu limite, roman de fantasy répétitif et sans réel intérêt ; on peine à saisir le projet de l’auteur. Alors on s’interroge. On se demande. Puis, bien vite, on oublie – comme on ne manquera pas d’oublier de lire les suites à venir.

Raphaël GAUDIN

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