Une lune aride recuite par des températures extrêmes perdue au fin fond des confins de l’espace humain, un caillou mal terraformé peuplé de colons à son image rude, anciens bagnards, truands et contrebandiers charognards promis à une mort aussi sèche qu’un coup de feu. Telle est Factus –, et non « Factis », comme écrit sur la quatrième de couverture (qui, de toute façon, en dit trop), coquille malheureuse que les mauvais esprits auront tôt fait de qualifier de lapsus…
La première, Dix Low, est médecin. Une baroudeuse revenue de tout, au parcours aussi chaotique qu’une ligne de vie sur Factus. Dopée aux amphétamines, pas totalement seule dans sa tête, et qui cache un paquet de secrets, dont dix années passées en prison et ce qui pourrait bien être un Premier contact. La seconde, Gabriella Ortiz, est une gamine d’une douzaine d’années. En apparence, tout du moins, car en définitive elle est bien plus que cela… Toutes deux ont combattu dans des camps opposés mais pour survivre, comme de bien entendu, il leur faudra collaborer – à la vie à la mort.
Premier roman traduit par chez nous de l’anglaise Stark Holborn, ce titre est présenté par son éditeur français comme un space western. Et c’est bien ce qu’il est – même si sa première moitié propose un théâtre des opérations évoquant davantage l’Afghanistan que Monument Valley. L’autrice elle-même en parle comme de la rencontre entre Mad Max et Halo Jones (héroïne éponyme de la BD d’Alan Moore et Ian Gibson) ; et c’est totalement ça aussi. On ne s’étendra pas sur la conversation plus qu’ancienne entretenue par la SF et le western. Mais le fait est que cette conversation nous dit une chose : la SF, c’est aussi l’aventure. À partir de là, une unique question prévaut : cela fonctionne-t-il ? Oui, plutôt. On suit le parcours de nos deux héroïnes en butte à une âpreté totale, un contexte général qui ne vise qu’à une chose : les mettre en miettes. Pas d’une immense originalité, parfois grevé par un manque d’empathie pour ses personnages et un style narratif volontairement heurté qui fragmente l’attention – on en vient à se dire que le livre aurait gagné à un petit essorage ; un comble, pour un récit aussi nerveux –, La Porteuse de mort se lit sans déplaisir aucun, même si l’on reste assez spectateur de l’ensemble. On appréciera notamment le petit côté Firefly de la seconde partie, mais un Firefly filmé par un John Carpenter en roue libre, et un moment de bravoure à mi-parcours proprement hallucinant.
Dans un contexte où l’offre éditoriale de SF tend à se raréfier, et plus encore l’offre éditoriale de SF d’aventures, le présent roman s’avère un moment de lecture-détente appréciable. Raide, très raide, même, mais plaisant. « L’espérance, c’est le désespoir surmonté », nous dit Bernanos. Voilà qui pourrait être gravé au front de nos deux héroïnes, voire de tous les habitants de Factus. Et s’il prenait l’envie aux éditions Albin Michel de traduire le second volet des aventures de Dix Low tout juste paru Outre-Manche (Hel’s Eight), sans doute qu’on sera du voyage – un périple qu’on imagine déjà avec un goût de fer dans la bouche.