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Les critiques de Bifrost

La Saga d'Oap Täo

Jean-Marc LIGNY
ACTUSF
448pp - 18,00 €

Critique parue en janvier 2015 dans Bifrost n° 77

La trame est des plus simples : croyant sauver une vie, Oap Täo, trafiquant et baroudeur de l’espace, a récupéré un droïde éjecté d’un vaisseau spatial détruit par la police fédérale interstellaire. Pour échapper à celle-ci, il se réfugie hors de sa juridiction, dans le bar d’un authentique Breton sur un astéroïde perdu. Forcé de fuir avant l’arrivée de la police autorisée, il embarque avec le seul autre client de l’établissement, Face-de-Lune, qui dispose d’un vaisseau suffisamment rapide pour distancer les condés spatiaux. Celui-ci, dont le corps est déformé par la Fleur, une redoutable drogue qui évacue les angoisses mais remodèle physiquement son consommateur, l’emmène sur Rasalgheti retrouver un comparse, Ay-Tek. Il s’avère assez rapidement que Face-de-Lune est au service de Crass, un bandit de la pire espèce, destinataire de l’importante cargaison de Fleur détruite par la police. La réparation du droïde était censée révéler l’emplacement de la drogue. Malheureusement, la mémoire de ce dernier est endommagée. Crass charge alors Oap Täo de dénicher la planète où se trouve la Fleur. Accompagné du droïde qu’il a nommé ZAG-O (son numéro de série étant 246-0), notre héros se met en quête malgré l’absence totale d’indices. Ses pérégrinations de monde en monde l’amèneront sur une planète où des lichens géants dotés de télépathie ont établi une relation symbiotique avec une espèce de chauve-souris, découverte qui est loin de signifier la fin de ses ennuis…

Paru en 1990, en trois volumes de la collection « Anticipation » du Fleuve Noir, ce sympathique space opera est, chronologiquement, le premier opus des « Chroniques des Nouveaux Mondes » dont les éditions ActuSF ont déjà publié l’intégrale des nouvelles en trois volumes. Comme Jean-Marc Ligny s’en explique dans l’interview en fin de volume, l’événement déclencheur de l’écriture du cycle est la rencontre avec le scénographe Jacques Lelut, qui exposait ses vaisseaux spatiaux à la convention SF de Roanne en 1979. D’autres volumes ont suivi au Fleuve Noir, ainsi que Les Oiseaux de lumière, en collaboration avec Mandy, chez J’ai Lu, ouvrage où intervient également Oap Täo.

Classique dans la forme, Jean-Marc Ligny développe une histoire du futur qui rend hommage au space opera d’antan, entre aventure et humour, et quelques séquences poétiques. Les clins d’œil dont il parsème le récit permettent de déceler les influences, « Les Seigneurs de l’Instrumentalité » de Cordwainer Smith en tête, mais aussi Kurt Vonnegut Jr, Gérard Klein et bien d’autres. Quelques bonnes idées agrémentent ce récit sans prétention, comme la maladie d’oscillation temporelle affectant les premiers pilotes de saut hyper-spatial, qui fait vieillir et rajeunir physiquement la victime à un rythme rapide. Pour la présente édition, le texte a été revu et mis à jour au regard des développements ultérieurs des « Chroniques ». C’est frais, enlevé, et sans temps mort, à mille lieues des dystopies écologiques de l’auteur. Pourquoi bouder son plaisir ? D’autant plus que Ligny pourrait prochainement revisiter son havre de paix pour se reposer de ses prospectives plus sombres.

Claude ECKEN

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