Léger comme un Alka Seltzer un lendemain de cuite après la remise du prix Goncourt, La Société protectrice des kaijus est le genre de livre inoffensif dont on recommande la lecture aux vieux geeks accoutumés au comique de répétition un tantinet lourdingue. Amusant, si l’on reste bienveillant, et surtout perclus de poncifs, le roman de John Scalzi coche toutes les cases d’un agréable moment de distraction. Mais, avant d’aller plus loin, que sont ces kaijus dont il convient de protéger l’existence ?
Afin d’éviter toute méprise, précisons d’emblée qu’il ne s’agit pas de comédiens engoncés dans une tenue caoutchouteuse, s’appliquant à pulvériser dans un déluge pyrotechnique les maquettes des principales capitales mondiales. Que les fans d’Ishiro Honda se rassurent également, car La Société protectrice des kaijus ne ressemble pas davantage à une variation sous stéroïdes du monstre des abysses nucléaires. Sur ce sujet, Roland Emmerich reste insurpassable. Bien au contraire, les kaijus de John Scalzi existent vraiment, quelque part dans une version parallèle de la Terre, l’univers n’étant pas avare en mondes multiples. Une découverte facilitée par la prolifération des essais nucléaires dont les détonations successives ont affaibli la frontière entre notre monde et celui des kaijus, poussant ces encombrantes bestioles à venir piétiner nos plates-bandes pour leur plus grand malheur, et notre effroi réciproque. Remercié dans des circonstances fort peu élégantes par un patron scélérat, Jamie se retrouve ainsi au cœur de ce secret bien gardé depuis plus de soixante-dix années par les principales puissances mondiales. Devenu « celui qui porte » dans la nouvelle équipe dépêchée pour assurer la relève à la base Tanaka, il n’est cependant pas au bout de ses surprises.
Il faut beaucoup d’indulgence et une suspension d’incrédulité XXL pour lire La Société protectrice des Kaijus, tant les ficelles narratives, les gimmicks et autres running gags sont énormes. À vrai dire, dans ce roman tout semble frappé du sceau de la pochade grossière et du clin d’œil surjoué. Mais, pour peu que l’on mette son cerveau en pause ou que l’on soit amateur des séances de méditation offertes (?) par Bernard Werber, les aventures de Jamie peuvent composer un divertissement honorable par leur vitalité, leurs allusions à la pop culture et un goût affirmé pour la science-fantasy. Alors, sait-on jamais, sur un malentendu, hein ?