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Les critiques de Bifrost

La Stratégie de l'ombre

Orson Scott CARD
L'ATALANTE
478pp - 21,90 €

Critique parue en avril 2002 dans Bifrost n° 26

On ne change pas un cheval qui gagne. Proverbe de turfiste. Or, Ender est un cheval qui gagne. Je ne parle pas bien sûr de son éclatante victoire sur les Doryphores mais du fait qu'il a imposé O. S. Card comme un auteur de premier plan en raflant par deux fois le doublé prix Hugo et Nebula pour La Stratégie Ender et La Voix des morts. Suivirent encore Xénocide et, plus anecdotique, Les Enfants de l'esprit.

Plutôt que de pondre une suite de plus, Card a choisi la voie de l'audace en optant pour un retour à la source : à l'École de Guerre, à l'époque où la menace des Doryphores planait sur l'Humanité et où Ender y faisait ses classes.

Rappelons le contexte, pour ceux qui ignoreraient tout de la série. Par deux fois, l'Humanité a été en butte aux attaques des Doryphores et le proverbe dit jamais deux sans trois. Troisième fois qui pourrait bien être la dernière car c'est là une guerre d'extermination. Vaincre ou disparaître. Pour survivre, si possible, l'Humanité a sélectionné les plus brillants de ses enfants dans le but d'en faire les officiers de cette guerre sans pitié. Leur entraînement est implacable, destiné à faire d'eux des machines non à combattre ou à tuer, mais à vaincre. Bien qu'étant des enfants, ils sont manipulés, conditionnés, soumis à une pression maximale de la part d'instructeurs qui exacerbent l'émulation au-delà de toute limite. La fin justifie les moyens. La survie justifie tous les moyens, même inhumains. C'est ce que pensent les instructeurs de l'École de Guerre. Le lecteur pourra tout à loisir se poser la question et essayer d'y répondre.

Card tient la gageure de revenir à l'École de Guerre à l'époque où Andrew Wiggin, dit Ender, y séjournait. Il revient donc sur les même événements mais vu, cette fois, par Bean. Si Ender était le chef, le maître de guerre, Bean sera son éminence grise.

On ne dira jamais assez combien Card est un conteur émérite, mais il est ici au mieux de sa forme. Pour copieux qu'il soit, La Stratégie de l'ombre se lit pour ainsi dire sans déglutir. Une nouvelle fois, l'auteur gagne son pari haut la main en réalisant l'alchimie d'une histoire passionnante et d'un art de la narration des plus consommés. De la bien belle facture.

Jean-Pierre LION

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