Adam-Troy CASTRO
ALBIN MICHEL
24,90 €
Critique parue en octobre 2021 dans Bifrost n° 104
Quelques mois après sa première publication en France avec Émissaire des morts (critique in Bifrost n° 102), Andrea Cort, l’héroïne misanthrope d’Adam-Troy Castro, revient pour un deuxième round avec La Troisième Griffe de Dieu. Ce nouveau volume comprend le roman éponyme et une courte nouvelle, « Un coup de poignard », racontée du point de vue d’un autre personnage récurrent de l’auteur, Draiken. Éliminons d’emblée la question de cette nouvelle : si vous ne connaissez pas les aventures précédentes de son narrateur, ce récit vous laissera de marbre et n’a qu’un but, vous rassurer sur les liens sentimentaux d’Andrea et de ses chéris après la fin du roman qui précède. Il s’agit plus d’une vignette de présentation qu’une véritable histoire comme l’étaient les quatre nouvelles précédant Émissaires des morts dans le premier opus.
En revanche, le roman en lui-même, La Troisième griffe de Dieu, ravira à la fois les fans d’Andrea Cort et les novices qui ne la connaissent pas ou qui veulent s’essayer en douceur à la science-fiction. En effet, il ne s’agit ni plus ni moins que de la transposition d’un grand classique des récits policiers dans un univers futuriste où humains, IA et aliens se mêlent : le meurtre en huis clos cher à Agatha Christie ou Sir Arthur Conan Doyle. Tour à tour dans la peau d’Hercule Poirot ou de Sherlock Holmes, Andrea Cort, accompagnée des Porrinyard, va enquêter, coincée dans la cabine d’un ascenseur spatial, sur le meurtre d’un érudit alien, alors qu’elle-même avait juste avant l’embarquement été victime d’une tentative d’assassinat avec une arme similaire, un artefact religieux que l’on croyait disparu depuis des millénaires.
La forme de La Troisième griffe de Dieu est donc un récit extrêmement classique dans lequel le lecteur ou la lectrice se glisse très facilement. Il n’y a pas nécessité d’avoir lu le volume précédent : Adam-Troy Castro se fait un plaisir de rappeler les points essentiels à savoir sur Andrea Cort, les Porrinyard et l’univers dans lequel les personnages évoluent. Et même si les deux livres peuvent se dévorer indépendamment l’un de l’autre, nous en apprendrons plus dans celui-ci sur le passé d’Andrea et sur ses particularités. Dans le fond, Adam-Troy Castro continue de dérouler ses interrogations sur l’aliénation de l’individu au collectif à travers les différents personnages inseps, mais aussi par ce qu’une grande entité économique peut exiger de ses salariés (sans en dévoiler plus). Il déploie également ses questionnements sur la part de la nature et celle de l’éducation dans la construction d’un individu. Ici, Andrea Cort lui sert à nouveau de sujet d’étude préféré, mais également la famille richissime de marchands d’armes Bettelhine, dont différents membres sont enfermés dans l’ascenseur spatial et constituent donc des suspects potentiels. Le tout sans trop s’appesantir pour ne pas oublier son objectif premier : divertir.