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Les critiques de Bifrost

La Ville sous globe

Thibaud ELIROFF, Edmond HAMILTON
TERRE DE BRUME
192pp - 17,25 €

Critique parue en avril 2018 dans Bifrost n° 90

Vous savez ce que c’est une bombe « supratomique » ? Eh oui, absolument : comme une bombe atomique, mais en pire. Et c’est ce qui tombe sur le coin de la figure de Middletown, Ohio (l’état d’Hamilton), 50 000 habitants en 1950 (et pareil en 2000, si on en croit Wikipédia). Une bombe envoyée par on ne sait qui (même si on a bien une petite idée), mais là n’est pas le propos. « On dirait que l’apocalypse ato-mique a commencé […] Le bouquet final… Comment se fait-il que nous soyons encore là, Kenniston ? Com-ment est-ce possible ? » Car en effet, la bombe en question, plutôt que de rayer Middletown de la carte, fracture le continuum spatio-temporel et envoie la ville quelques millions d’années dans le futur. Si si. Une époque ou la Terre n’est plus qu’une coquille aussi glaciale que stérile… Et tout ce petit monde, passé la sidération bien compréhensible (sentiment qui n’épargne pas le lecteur) de se retrouver con-damné à court terme « dans le silence de la Terre mourante ». À moins que… Car en effet, une étrange cité futuriste, une ville sous globe totalement déserte, est bientôt décou-verte à quelques kilomètres de Middletown. Le déménagement est un crève-cœur, mais les voyageurs temporels n’ont pas le choix : leur ville n’est plus un abri viable ; ils doivent quitter Middletown et espérer que les merveilles technologiques de l’étrange cité leur permettront de survivre. Or, à peine sont-ils installés dans ce nouvel environnement qu’un vaisseau spatial déchire le ciel…

Initialement publié dans Startling Stories en juillet 1950, avant de paraître en volume un an plus tard, La Ville sous globe est l’un des plus célèbres romans d’Hamilton. Et pour cause. De facture classique, voire datée (intrigue linéaire au point de vue unique, per-sonnages un tantinet caricaturaux – dans leur jus, disons), ce petit livre qui se lit d’une traite brasse un nombre de thématiques incroyables et enchaine les péripéties à un rythme effréné du début à la fin. On s’y installe tout naturellement comme dans de vieux chaussons confortables, et on regarde, un brin médusé, cette humanité se débattre face à l’incompréhensible, l’inique et l’incon-trôlable ; toute la condition humaine passée à la moulinette d’une mise en abîme science-fictive ébouriffante. Nul doute que rédigé en 2017, La Ville sous globe nous aurait épargné des saillis du genre de celle-ci : « La tendresse qu’il ressentait à son égard tem-pérait l’irritation que lui causait l’incapacité du cerveau féminin à saisir l’essentiel d’une situation. » (Qu’on se rassure, notre héros rencontrera plus loin un personnage féminin d’une grande force qui bousculera ses certitudes…). Nul doute non plus qu’au lieu de ses deux cents pages, il en aurait fait cinq cents. En aurait-il été meilleur ? Il est permis d’en douter. Bref, voilà un excellent petit bouquin à dévorer sous la couette (il y fait froid, dans ce livre !), dans l’édition Terre de Brume, à la traduction révisée, bien entendu (même s’il reste pas mal de coquilles et que la maquette intérieure en corps 8, interlignage 12, pique salement les yeux).

Olivier GIRARD

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