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Les critiques de Bifrost

La Voie de la Colère

La Voie de la Colère

Antoine ROUAUD
BRAGELONNE
480pp - 25,00 €

Bifrost n° 74

Critique parue en avril 2014 dans Bifrost n° 74

Dun Cadal, ancien général de l’Empire déchu, fait profil bas dans une cité cosmopolite pour échapper aux purges orchestrées par la nouvelle république, ruminant ses erreurs et sa gloire passée en se détruisant méthodiquement les neurones au gros rouge qui tache. Jusqu’à ce qu’une jeune historienne républicaine à la recherche de l’épée impériale, symbole de l’ancienne dynastie, que Cadal aurait cachée après avoir fui le palais impérial en ruine lors de l’attaque finale des révolutionnaires, le perce à jour. Notre héros, fatigué et amer, accepte alors malgré lui de raconter son histoire, qui se confond avec la chute annoncée d’un empire décadent qu’il aura défendu jusqu’au bout. Acteur de premier ordre de l’agonie relativement rapide de la dictature dont il reconnaît les torts, il n’en reste pas moins fidèle à son serment et défend encore ses actions, ultime coquetterie d’un vieillard aigri…

Ce qui débute comme un remake nouveau siècle du « Loup de Deb » de Nicolas Jarry se transforme rapidement en une magnifique aventure fantastique à l’intrigue d’une rare intelligence. L’auteur nous balade avec une maîtrise étonnante, surtout pour un premier roman, dans une épopée ébouriffante où les surprises et les rebondissements sont non seulement crédibles, mais qui plus est parfaitement imprévisibles.

Rien ni personne n’est ce qu’il semble être, si ce n’est, peut-être, le vieux général, manipulé, usé et abusé par tous les partis en présence et qui maintiendra son honneur et sa naïveté tout au long du récit.

Les combats sont homériques, les héros surpuissants sans être invincibles, et les batailles de masse alternent avec les échauffourées à la Dumas.

Un livre que l’on ne lâche plus tant on veut savoir absolument les tenants et les aboutissants de ce drame qui est tout sauf manichéen. Une fois refermé, on reprend son souffle en regrettant d’abord l’absence de fin manifeste, puis, au bout de quelques minutes, en exultant à l’idée d’une suite, voire de plusieurs.

Un auteur est né, et si ce qui est à venir s’avère du même niveau, une grande fresque de fantasy vient de débuter.

Précisons enfin que contrairement à ce que pourrait laisser penser le prix de vente assez salé de ce roman, il n’en a pas moins été écrit en français. Le style s’avère du coup beaucoup plus fluide que nombre de traductions, a fortiori celles de Bragelonne, qui ne nous a que trop habitué à des massacres à la Google Translate effectués par des stagiaires fans de rap et parlant couramment le SMS.

Mathias ROUSSEAU

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