Arthur C. CLARKE
POCKET
352pp - 7,30 €
Critique parue en avril 2021 dans Bifrost n° 102
Lorsqu’Arthur C. Clarke a publié cet essai, le 50e anniversaire du premier pas de l’homme sur la Lune se situait dans un avenir distant de 33 ans — un laps de temps suffisamment vaste pour que l’ouvrage de prospective le plus informé (ce que n’est pas le présent essai) se retrouve obsolète.
Le point de départ de ce 21 juillet 2019 est science-fictif : à la suite des annonces d’un président américain volontariste au début des années 90, Clarke imagine le retour des humains sur notre satellite naturel, et déploie un panorama de la vie sur Terre et dans l’espace en ce début de XXIe siècle rêvé, au fil de chapitres passant en revue différents aspects sociétaux — la santé, le sport, la culture, les technologies, les conflits. Il est aisé de jouer au jeu des sept (ou plus) erreurs, pour pointer là où l’auteur de 2001 a vu juste et là où il est tombé à côté de la plaque, mais il serait malvenu de lui en tenir rigueur. Il n’empêche : certains chapitres ont mal vieilli, en particulier ceux sur la santé mentale, les sports ou la guerre. Par moment, la vision de Clarke sur l’avenir se fait myope (non, en 2019, les films ne seront pas forcément colorisés pour plaire au public). À l’inverse, d’autres gardent une certaine pertinence (les loisirs). Ainsi Clarke, au fil de la petite quinzaine de chapitres, fait-il preuve d’un optimisme constant sur 2019 et l’avenir : nous vivrons mieux, plus longtemps, robots et IA nous faciliteront la vie, et les guerres, s’il y en a, seront menées chirurgicalement, épargnant populations et bâtiments civils (hmm…). Chaque chapitre débute par une brève introduction narrative : rien d’étonnant à ce que tout le chapitre sur la domotique prenne l’aspect d’une nouvelle de SF policière. À vrai dire, lire cet essai en 2021 n’a guère d’intérêt, si ce n’est pour le fan ultime de Clarke ou pour qui s’intéresse à comment était perçu l’avenir au mitan des années 80. Et le meilleur passage en reste l’introduction : « Bien que la SF n’exige aucune justification (lorsqu’elle est convenablement écrite), elle revêt une valeur sociale en tant que signal d’alarme. »