Les éditions ActuSF poursuivent leur travail autour de Robert Silverberg : après Les Vestiges de l’automne et Hanosz Prime s’en va sur Terre, voici Le Dernier Chant d’Orphée, troisième (court) volume du maître à leur actif. Une novella inédite, qui est par ailleurs le dernier long texte en date de l’auteur (la VO date de 2010). Le titre est sans ambiguïté sur le contenu : on a là affaire à la légende du chantre grec, dans la lignée mythologique entamée par Gilgamesh, roi d’Ourouk. Et il sera à nouveau question de voyage, de mort et du mythe : un condensé de Silverberg.
L’histoire, qui ne la connaît déjà ? Orphée lui-même la connaît aussi : pour lui, vivant dans un éternel retour nietzschéen, passé et futur ne font qu’un. Sous une forme incantatoire, l’aède raconte avec lucidité l’histoire de sa vie à son fils Musée : sa rencontre avec Apollon et son initiation à la lyre et aux mystères de l’univers auprès du dieu, la (trop courte) idylle avec Eurydice, la descente aux Enfers qui s’ensuit pour amadouer Hadès, l’exil en Egypte, puis l’expédition avec les Argonautes, et la fin sanglante du poète auprès des furieuses Bacchantes, qui refusent de comprendre qu’Apollon et Dionysos sont deux faces de la même réalité.
Ce Dernier Chant d’Orphée ne jette aucun éclairage nouveau sur la vie de l’aède grec, mais l’amateur éclairé pourra s’amuser à déceler les différences (mineures) entre la légende et la réécriture qu’en fait Silverberg. Toutefois, tant qu’à lire un texte inédit de l’auteur, on aurait préféré une relecture plus originale du mythe. Pas de quoi bouder son plaisir cependant : la novella est d’une lecture agréable, prouvant que son auteur n’a rien perdu de son talent, et est rehaussée d’une courte mais intéressante introduction de Pierre-Paul Durastanti ainsi que d’une interview menée par Eric Holstein, ce qui permettra de nous rassurer sur ce point : Le Dernier Chant d’Orphée n’est en rien « Le Dernier Texte de Silverbob ». Ouf !