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Les critiques de Bifrost

Le Janissaire

Le Janissaire

Olivier BÉRENVAL
MNÉMOS
336pp -

Bifrost n° 101

Critique parue en janvier 2021 dans Bifrost n° 101

Les janissaires étaient des soldats-esclaves, recrutés de force dès l’enfance pour intégrer un corps d’armée redouté par les ennemis de l’empire ottoman jusqu’au XIXe siècle : Olivier Bérenval s’inspire de cette tradition militaire et la prend pour prétexte d’un retour à l’univers de son roman Nemrod. Le Janissaire semble se dérouler à une époque antérieure à celle de son prédécesseur : sans lien narratif évident entre les deux textes, il serait difficile de déclarer qu’il en constitue à coup sûr la préquelle.

Après un space opera faisant la part belle aux périls cosmiques, place donc à un planet opera se déroulant sur une planète aride, en cours de colonisation et en partie arriérée. Y vit un variant de l’humanité adapté à ses conditions hostiles, porté au secret, dont certains membres s’opposent à l’ordre du pouvoir central qu’incarne un genre de proconsul aussi cruel que décadent. Comme le lecteur s’en rendra compte, il ne manque presque rien — hormis l’Épice, peut-être… et encore… — pour que la citation de Dune (après celle entre autres d’Hypérion dans Nemrod) soit sensible. Toute œuvre se nourrissant de celles auxquelles son auteur a eu accès au préalable, il n’est pas étonnant que Le Janissaire ait une apparence de collage littéraire.

Certains éléments du collage s’assemblent assez bien : Kimsè, le Janissaire éponyme, est de toute façon lui-même un collage humain et informatique dont les souvenirs sont au moins en partie truqués ; l’enquête policière, destinée à résoudre l’énigme de l’assassinat d’une huile, ne saurait être menée à bien par un individu isolé ; enfin la révolte qui décidera du sort du monde va dépendre d’actions décentralisées. Malheureusement, d’autres éléments du collage ne convainquent pas. Que cherchait au fond à nous raconter l’auteur de ce texte ? S’agissait-il de sense of wonder pur et simple ? Voulait-il nous parler de ce qui fait l’essence de l’identité humaine ? Désirait-il donner à voir une révolte victorieuse ? Quelle qu’ait été son intention, c’est le texte lui-même et sa construction qui perdent le lecteur, à tel point que le seul bon moment de ce livre finit par être celui où on le termine. On pourra regretter que ce sentiment ne se soit présenté qu’au terme de cinq mille pages ressenties…

Arnaud BRUNET

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