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Les critiques de Bifrost

Le Langage de la nuit

Le Langage de la nuit

Ursula K. LE GUIN
LIVRE DE POCHE
192pp - 7,70 €

Bifrost n° 114

Critique parue en avril 2024 dans Bifrost n° 114

Romancière exceptionnelle dont la renommée n’a cessé de s’accroître depuis son décès en 2018, Ursula K. Le Guin ne s’est pas contentée de s’illustrer en science-fiction (le cycle de « l’Ekumen », dont le Livre de Poche vient de publier l’intégrale en deux forts volumes), en fantasy (le cycle de « Terremer »), en littérature blanche ou en poésie, elle a aussi écrit bon nombre d’articles, rassemblés à leur tour en recueils, comme Conduire sa barque (cf. Bifrost 96), Danser au bord du monde (cf. Bifrost 99) ou le présent Langage de la nuit. Paru une première fois en 2015 aux Forges de Vulcain dans une version abrégée, ce recueil est revenu à l’automne dernier en édition intégrale – quatorze articles venant ainsi s’ajouter aux dix déjà traduits. En soi, cela suffirait à faire de ce recueil un indispensable. Détaillons.

Manière de pot-pourri, Le Langage de la nuit contient donc des articles, des préfaces – tant aux propres livres de l’autrice qu’à un recueil de James Tiptree Jr. – ainsi que la retranscription d’un discours donné à la Bibliothèque du Congrès des USA. Tous datent du cœur des années 70, donc du moment où Le Guin a achevé la première partie du cycle de « Terremer », a écrit les meilleurs romans de « l’Ekumen », et entame sa mue vers la littérature générale. Une période faste s’il en est.

En chaque cas, la plume de Le Guin y est claire, intelligente, amicale. Elle célèbre avec une passion communicative son amour des mauvais genres – SF, fantasy, contes de fées –, et s’interroge sur leurs devenirs possibles et leur évolution. Ses préfaces à ses romans la voient revenir avec lucidité (et un rien de sévérité) sur ses premiers romans de SF, comme sur la question du genre dans La Main gauche de la nuit. Elle s’interroge aussi sur l’écriture, les ateliers d’écriture, la place de l’écrivain. Quelques essais apparaîtront un peu datés : depuis George R. R. Martin, l’Amérique n’a plus trop peur des dragons ; d’autres conservent leur pertinence, plus de quarante ans après leur rédaction, en particulier tout ce qui concerne la place des littératures de l’Imaginaire et leur réception par le public ou la critique.

Indispensable, écrivait-on plus haut. Passionnant aussi, bien sûr. Un livre que toute bibliothèque idéale se doit de posséder.

Erwann PERCHOC

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